En exclusivité francophone, RTL info a pu essayer durant une après-midi la Tesla Model S dans sa nouvelle version musclée, baptisée P85D. Plongée au cœur de la voiture du 21e siècle, 100% électrique, 100% connectée, 100% intelligente…
Vous en voyez de plus en plus sur nos routes: des grosses berlines sportives mais silencieuses, généralement conduites par des chefs d'entreprise. Il s'agit d'une Tesla Model S, une des rares voitures 100% électriques qui se vend bien en Belgique, même si elle coûte minimum 71.900€.
C'est qu'elle convient parfaitement à la législation belge actuelle pour ce genre de voitures. Une entreprise peut déduire de son bénéfice imposable 120 % des frais du véhicule à titre de charges professionnelles (alors que la déduction est de 50 à 100 % pour les autres véhicules en fonction de leur émission en CO2).
Quant au fameux ATN (avantage toute nature) qui diminue votre salaire, il est de 4% (au lieu 5,5). Bref, on sait que fiscalement, on fait une affaire. Mais surtout, derrière cette voiture, il y a tout un concept vraiment innovant, qui fait table rase de toutes les vieilles habitudes du monde de l'automobile.
Pour tout vous expliquer, RTL info a rencontré des responsables de Tesla et a essayé la dernière version de cette incroyable voiture, à Maasmechelen dans le Limbourg (Flandre), lors d'un évènement exclusif la semaine dernière.
Du roadster au SUV
Un petit peu d'histoire, d'abord. Tesla est une entreprise basée à (et influencée par) Palo Alto, berceau de la Silicon Valley. Fondée en 2003, la petite société, voisine de Facebook, HP et Skype, a repensé totalement la vision de l'automobile, l'inscrivant résolument dans le 21e siècle. Un exemple parmi d'autres: il n'y a pas de concession, les acheteurs doivent passer par le site web du constructeur, y personnaliser leur véhicule et le commander, moyennant un acompte de 2.000 euros
Retournons en Californie. En 2006, après avoir convaincu des investisseurs d'injecter des millions d'euros dans la start-up, un premier prototype de roadster est présenté. La curiosité, la demande et les ventes sont au rendez-vous. Cela donne des ailes (et encore plus de crédibilité auprès des investisseurs) à Tesla.
Une berline - la Model S que vous croisez parfois sur le ring de Bruxelles ou d'Anvers - suit en 2012, après 4 ans de travail.
En 2016 arrivera la Model X, un SUV, suivi d'un Model 3 enfin abordable (sans doute à 35.000 dollars) en 2017. Bref, l'avenir s'annonce radieux pour le constructeur, même s'il ne gagne toujours pas d'argent (mais c'est le principe d'une start-up, qui dépense beaucoup au début pour s'implanter).
Une transmission intégrale de 700 chevaux… qui consomme moins: toujours 500 km d'autonomie
La Tesla Model S que nous avons essayée, c'est vraiment la voiture du futur. Commençons par l'élément principal: elle est 100% électrique et dans sa dernière version, à transmission intégrale (les 4 roues sont motrices).
Alors que la plupart des voitures traditionnelles dites "4x4" consomment généralement davantage, avec la Tesla Model S, c'est l'inverse. Y compris sur la version P85D surpuissante (700 chevaux!) que nous avons pu essayer.
"Il y a deux moteurs, un de 476 chevaux à l'arrière, et un de 224 chevaux à l'avant. Ils se répartissent le travail intelligemment, gérant le transfert de poids selon la situation", nous a expliqué Karl Berridge, qui travaille au marketing au niveau européen. Au final, l'autonomie est la même que la version deux roues motrices, alors que la puissance et la tenue de route sont nettement meilleures. On peut donc dire qu'elle consomme moins d'énergie…
L'autonomie sur ces véhicules et de 500 km, grâce aux batteries délivrant une puissance de 85 kWh. Cela ne vous parle sans doute pas beaucoup, mais c'est une prouesse technologique d'insérer autant d'énergie dans une berline sportive. "Il y a de grosses batteries, mais elles sont surtout d'une grande densité de puissance", nous a-t-on expliqué.
Il y a de la place pour les stocker, forcément, vu qu'on se passe d'un moteur thermique lourd et très encombrant. Oubliez tout ce que vous connaissiez des voitures: Tesla fait vraiment les choses autrement…
Une accélération record… en silence
Et le plus dingue avec cette berline de luxe, c'est qu'elle accélère comme aucune autre voiture de sa catégorie (une 4 portes, donc). Nous avons pu essayer, sur une route fermée, cette fameuse puissance. Et notre verdict est sans appel: 3,4 secondes pour passer de 0 à 100 km/h, en écrasant simplement la pédale d'accélération. Vous êtes collé au siège, vous n'entendez que le souffle de l'air traversé par la voiture, et léger bruit de turbine en dessous de vous: ce sont les deux moteurs électriques qui délivrent une puissance continue, sans passage de vitesses (forcément, il n'y en a pas…).
Pour avoir déjà écrasé le champignon de la plus sportive des Maserati, nous devons avouer que le son et les vibrations nous manquent un peu, car ils vous plongent d'une ambiance grisante, effrayante.
La Model S pousse plus fort: votre corps s'en rend compte (il est plaqué en arrière), mais pas spécialement votre tête. Une question d'habitude que les générations futures n'auront sans doute pas…
Quant à la tenue de route, vue les 4 roues motrices et la meilleure répartition du poids (50% à l'avant, 50% à l'arrière), elle est phénoménale. D'autant que, comme on l'a dit, la voiture utilise le moteur avant ou arrière de telle manière à favoriser la tenue de route. En accélération, en virage ou en décélération, le poids se répartit forcément différemment.
Cette version améliorée de la Model S, baptisée P85D, est évidemment plus chère: le prix de base est de 107.300€…
100% connectée
Passons à l'inédit écran tactile vertical de 17 pouces, qui contrôle les paramètres techniques de votre véhicule, mais sert bien entendu de GPS, de centre multimédia, de navigateur, etc. On voit que la voiture a été développée dans la Silicon Valley: elle inclut une connexion 3G (et non 4G, hélas pour la rapidité) et "un abonnement permanent et illimité en quantité de données, même à l'étranger", nous a promis M. Berridge.
Si la navigation n'est pas très pratique (une vue en 2D sur base de Google Maps), le reste est vraiment agréable à l'usage, même si on conseille à Tesla de mettre des processeurs un peu plus puissants pour que l'interface soit aussi rapide que la voiture.
On peut suivre les performances du véhicule, sa consommation. Et surtout trouver rapidement la station de recharge rapide la plus proche.
Comment la recharge-t-on ?
Si les finances de Tesla sont dans le rouge (de manière contrôlée, cependant), c'est aussi à cause de l'infrastructure de recharge qu'elle met en place actuellement dans le monde (voir la carte).
En Europe, il y a 160 stations où l'on peut trouver des "Superchargeurs", dont 3 en Belgique, 1 en Wallonie (à Nivelles). Il y en a également une juste à côté de la frontière néerlandaise, à 5 km de Maasmechelen.
Ces chargeurs d'une puissance de 120 kW (vous n'en avez que 11 à domicile, avec un adaptateur) vous permettent d'obtenir 270 km d'autonomie en 30 minutes, "ce qui est suffisant pour se rendre à la prochaine station".
"Le chargement de chaque cellule est comparable à un verre d'eau que l'on remplit à ras bord. Au fur et à mesure que le verre se remplit, on doit réduire le débit pour pouvoir ajouter de l'eau petit à petit sans qu'elle ne déborde". C'est pourquoi il faut 40 minutes pour charger 80% de la batterie, mais 1h15 atteindre les 100%.
Ces stations sont situées stratégiquement près des hôtels, des restaurants ou des centres commerciaux. Elles sont totalement gratuites sur les modèles à 4 roues motrices, mais requiert l'option "superchargeur" sur le modèle de base (plus de 2.000€). L'application Tesla, sur smartphone, vous permet de consulter le niveau des batteries à distance, en temps réel.
Et il vaut mieux les utiliser, car chez vous, sur une prise de base, on estime à 36 heures le temps nécessaire pour une recharge complète.
Une voiture vraiment intelligente
Si la Tesla Model S n'est pas une voiture comme les autres, c'est aussi parce qu'elle est équipée, au niveau du matériel, pour le futur, lorsqu'on pourra laisser sa voiture conduire toute seule.
"Pour l'instant, c'est limité à l'autoroute. Le pilotage automatique fait appel à une caméra orientée vers l'avant, un radar et à des capteurs sonar à 360°", nous a expliqué le responsable marketing de Tesla.
"Quand les routes sont dégagées ou quand la circulation est dense, la voiture se repère, accélère et freine à votre place". Le volant ne tourne pas encore tout seul, même si c'est pour bientôt. "Il suffira alors d'actionner le clignotant pour changer de voie".
La caméra surveille constamment les panneaux de signalisation, les feux tricolores et les piétons, afin d'éviter tout accident.
Les différentes fonctions du pilote automatique sont déployées au travers des mises à jour logicielles. C'est le gros avantage des Tesla: elles peuvent être "upgradées" uniquement en modifiant le software qui contrôle toute la voiture, via l'application pour smartphone, de chez vous.
Pour l'instant, elle peut déjà sortir de votre garage, en consultant votre agenda auquel elle est reliée. Si vous le remplissez correctement, et que vous avez une propriété privée, elle sortira de votre garage et vous attendra devant la porte, à la température souhaitée.
Ce n'est vraiment pas une voiture comme les autres… L'option "autopilote" coûte cependant 4.400€.
Conclusion
Pour tous les enthousiastes des nouvelles technologies et du progrès, cette berline Model S de Tesla est une vraie révolution. La version musclée, avec deux moteurs électriques, l'est sans doute encore plus.
A l'heure actuelle, seuls les chefs d'entreprises qui y trouveront quelques avantages fiscaux non-négligeables, et les personnes fortunées, peuvent se permettre de dépenser au minimum 72.000€ pour l'acquérir.
Mais elle est le symbole de l'ambition du constructeur américain de faire (enfin) passer la voiture dans le 21e siècle, la rendant intelligente et connectée, et la débarrassant d'un moteur à combustible cher et polluant.
Tesla, qui a construit sa propre usine de batteries en partenariat avec le spécialiste Panasonic, travaille activement à les rendre de plus en plus performantes et de moins en moins dépendantes de métaux précieux comme le Lithium.
Si elle parvient à les rendre plus abordables et plus faciles à recycler et à produire ; si elle met en place un bon réseau de recharge rapide et gratuit (c'est sa vision de la chose, nous a-t-on promis), alors elle pourra pénétrer un marché plus large, celui du grand public.
On n'attend que ça, et c'est peut-être, déjà, pour le Model 3 prévu en 2017.
Mathieu Tamigniau (Twitter: @mathieu_tam)
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