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Terry a appelé 535 fois la centrale téléphonique pour inscrire son fils en première primaire à Bruxelles-Ville: "C'est hallucinant!"

Terry a appelé 535 fois la centrale téléphonique pour inscrire son fils en première primaire à Bruxelles-Ville: "C'est hallucinant!"
 
 

Terry, une mère de famille bruxelloise, a appelé 535 fois le call center de la Ville de Bruxelles pour inscrire son fils, Elias, en première primaire dans l'école de son choix. Malheureusement, elle est arrivée trop tard: "Il n'y a plus de place, nous sommes sur liste d'attente. Je trouve ce système de centrale téléphonique injuste". De son côté, le cabinet de l'échevine de l'instruction publique défend la procédure: "C'est le système le plus juste qui soit".

Terry a rarement passé autant de temps au téléphone. "Lundi, toute la matinée, j'ai tenté de joindre le call center de la Ville de Bruxelles, en vain. En trois heures, j'ai effectué plus de 350 appels", comptabilise, preuve à l'appui, cette mère de famille, révoltée. L'objectif des coups de fil? Inscrire son fils, Elias, en première primaire pour la rentrée académique de septembre 2016 dans l'une des 24 écoles organisées par la ville de Bruxelles. Malheureusement, le numéro vert 0800/99.855, mis à disposition des parents et en service depuis ce lundi 8h30, est saturé d'appels. "Chaque fois, c'était la même chose, déplore Terry, après nous avoir joints via notre page Alertez-Nous. Soit la ligne était occupée, soit la communication s'interrompait brusquement, soit je tombais sur un message vocal me demandant de rappeler ultérieurement". Le lendemain, mardi, la situation était la même en début de matinée. "Mardi, j'ai passé 185 appels environ", compte la maman d'Elias.

Faten Alamat, cheffe de cabinet de l'échevine de l'instruction publique à la Ville de Bruxelles, Faouzia Hariche, confirme: ces trois ou quatre premiers jours sont une période de rush classique. "Lundi, on a enregistré 460 inscriptions, mardi 475, puis ça va diminuer, assure Faten Alamat. Après ces premiers jours, ce n'est plus compliqué d'avoir quelqu'un en ligne".

Sa mère et son compagnon appellent en même temps pour tenter de décrocher une place

La procédure téléphonique est le seul moyen dont disposent les parents pour inscrire leur enfant en première maternelle et en première primaire dans l'une de ces 24 écoles gérées par Bruxelles-Ville. Du 1er au 18 décembre 2015, les élèves prioritaires (qui ont un frère ou une sœur dans l'entité scolaire, par exemple) ont pu être inscrits via cette centrale téléphonique. Ensuite, du 4 au 29 janvier, les élèves non prioritaires (dont fait partie Elias, ndlr), peuvent être inscrits: les demandes d’inscription sont enregistrées suivant l’ordre d’arrivée par la centrale téléphonique. "C'est 'Premier arrivé, premier servi', donc tout le monde a appelé, comme moi, lundi matin", explique Terry. Comme beaucoup de parents, elle a mis sa famille à contribution. "Ma mère appelle de son côté et mon compagnon aussi. Mais personne n'a pu avoir en ligne qui que ce soit".

"C'est ce que tout le monde fait et on peut comprendre les parents, mais ça sature les lignes", avertit la cheffe de cabinet.

Treize personnes au call center: "Ils jugent ça suffisant?", questionne Terry

Les employés mobilisés pour répondre aux appels des parents sont une douzaine. "Il y a dix lignes téléphoniques opérationnelles pour lesquelles treize personnes se relaient, précise Faten Alamat. Un inspecteur pédagogique supervise le tout. Les personnes qui décrochent sont des instituteurs ou auxiliaires d'éducation, le personnel de nos écoles". La ville a évidemment beaucoup de travail: elle doit gérer l'attribution d'environ 3.500 places (dont 1569 places en première primaire, la classe que doit intégrer le fils de Terry, ndlr), dans une région où la démographie explose. "On ne sait pas combler ces milliers de places en une matinée", justifie la cheffe de cabinet. On ne peut malheureusement pas mettre au service 40 opérateurs qui répondent au téléphone".

"C'est hallucinant, condamne Terry. Ils jugent ça suffisant pour les 24 écoles gérées par la Ville de Bruxelles? En gros, je n'aurai pas de place pour mon fils dans l'école primaire Emile Jacqmain".

 

Terry préférait encore l'ancien système et faire la file devant l'établissement

Le problème à Bruxelles est connu: la demande est supérieure à l'offre dans les écoles ayant meilleure réputation. "Je trouve le système actuel injuste et je trouve qu'ils se moquent un peu de nous, juge Terry. La bonne vieille méthode de faire la file c'était encore le plus juste et le plus efficace. Là, j'ai perdu deux matinées entières accrochée au téléphone. J'ai la chance d'avoir un patron assez cool, sinon j'aurais dû prendre deux matinées de congé pour pouvoir téléphoner".

"Je comprends le désarroi de cette mère de famille, mais avec l'ancien système, il aurait pu lui arriver la même chose, répond Faten Alamat. Elle aurait pu connaître un cas de discrimination ou bien elle aurait pu ne pas avoir de réponse en cas d'absence au secrétariat de l'école. Toutes les écoles n'ont pas de secrétariat à temps plein".

"Ce call center a été fait dans l'intérêt des parents, insiste Faten Alamat. C'est beaucoup plus efficace que si les parents appelaient dans les écoles elles-mêmes. Avant, les parents devaient faire le tour de sept, huit, neuf écoles". La cheffe de cabinet évoque également le rôle des autorités en ce qui concerne le problème de fond: "Notre job est aussi d'augmenter le nombre de places au fur et à mesure pour répondre à l'ensemble des demandes des parents qui veulent légitimement mettre leur enfant dans une école où il y a un projet éducatif de qualité".

La procédure a été réadaptée il y a plusieurs années déjà

Le call center n'a pas toujours existé. Il y a plusieurs années, l'instruction publique de la Ville de Bruxelles avait d'abord tenté d'instaurer un système d'inscription au sein même des écoles, mais la procédure a été jugée insatisfaisante. Le système a donc été réadapté: le numéro vert centralise toutes les demandes, ce qui évite les doublons par la même occasion. "Nous avons voulu mettre l'accent sur trois critères: l'équité entre les enfants (donc pour éviter les cas de discrimination), la transparence (qui permet la possibilité de vérification en cas de plainte) et la solidarité entre les écoles (pour éviter que l'une ou l'autre école n'ouvre ses inscriptions bien plus tôt et permette aux parents les plus avertis d'y inscrire leur enfant avant les autres)", défend la cheffe de cabinet.

L'administration reconnaît que le meilleur système doit encore être inventé. "Aucune procédure n'est parfaite, admet Faten Alamat. Mettre 600 opératrices le premier jour, c'est impossible. Le système actuellement en place est le plus juste qui soit".

 

En fin de matinée, le verdict tombe: pas de place pour le fils de Terry dans l'école de son choix

Pendant deux jours, Terry a multiplié les appels successifs, pour atteindre 535 coups de fil. Puis, mardi, en fin de matinée, quelqu'un décroche. "Malheureusement, c'était trop tard', regrette la mère d'Elias. L'école Emile Jacqmain, dans laquelle elle voulait inscrire son fils est complète. "On m'a inscrite sur une liste d'attente à la quinzième place. J'ai appelé l'école pour savoir ce que je devais penser de la situation. Le personnel a été très honnête avec moi et m'a dit qu'il y avait très peu d'espoir que mon fils intègre cet établissement. Il faut compter sur les déménagements, ou les élèves qui quittent l'école par exemple".

Que va faire Terry à présent? La mère de famille semble se diriger vers l'enseignement libre ou privé, quitte à payer plus cher ou à se déplacer plus loin dans Bruxelles. "J'ai contacté d'autres écoles dont certaines sont privées, indique Terry. Tout ce que je souhaite, c'est inscrire mon enfant dans une école dont le projet pédagogique me plaît, avec une bonne réputation et un bon niveau scolaire".


 

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