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Aucun traitement n'existe contre la maladie rare de Juliette, le syndrome de Pitt Hopkins: "Elle ne parlera peut-être jamais"

Aucun traitement n'existe contre la maladie rare de Juliette, le syndrome de Pitt Hopkins: "Elle ne parlera peut-être jamais"
 
 

Benoît, le papa d'une petite Juliette, a voulu sensibiliser le grand public à la maladie dont souffre sa fille: le syndrome de Pitt Hopkins. A cause d'une mutation génétique, la fillette de 5 ans ne sait pas parler et commence seulement à marcher. Aucun traitement n'existe contre cette maladie rare qui toucherait "entre 30 et 50 Belges", selon les estimations des cas recensés actuellement.

Juliette a 5 ans et 4 mois. La fillette vit à Tamines, dans la commune de Sambreville (province de Namur), et commence seulement à marcher. Elle sait dire quelques mots, mais elle ne parlera peut-être jamais. C'est ce que les médecins ont dit à ses parents lorsqu'ils ont enfin diagnostiqué, au mois d'août dernier, la maladie dont elle souffrait: le syndrome de Pitt Hopkins, dont seulement 30 à 50 patients seraient atteints en Belgique. "Je n'avais jamais entendu parler de cette maladie, raconte son papa, Benoît, après nous avoir écrit via notre page Alertez-nous. Jusqu'à présent, on nous disait qu'elle était handicapée, mais aujourd'hui, on sait enfin de quoi elle souffre exactement".

Juliette souffre d'un déficit mental et moteur: "J'ai culpabilisé"

A la naissance de leur fille, Benoît et son ex-compagne remarquent que l'enfant est plus "lente". "Mon ex-compagne me disait que la petite restait beaucoup couchée dans son relax, qu'elle était un peu molle, qu'elle manquait de dynamisme, raconte Benoît. Le pédiatre, lui, nous disait que ce n'était rien de grave. Mais en fait, ça l'était". Les parents décident alors de faire passer une batterie de tests à Juliette. A l'époque, l'enfant a 1 an et demi. "Les médecins ont confirmé un retard mental et psychomoteur", se souvient Benoît. La nouvelle fut difficile à vivre. "On culpabilise beaucoup en tant que parents, on remet beaucoup sur sa faute à soi, mais c'est la faute à pas de chance et voilà, confie le papa. J'ai surtout vécu cela quand Juliette était petite. On se sent toujours un peu indirectement responsable. Je pense que beaucoup de parents réagissent comme ça".

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Les tests ne donnent rien: impossible de savoir de quoi souffre Juliette

Les parents de Juliette comprennent que leur fille est handicapée, mais ils ne connaissent toujours pas le mal qui l'affecte. Les premiers tests ne donnent rien. "Parfois, en regardant le visage d'un enfant, on peut dire de quelle maladie génétique il souffre, explique Damien Lederer, médecin généticien au centre de génétique humaine de l'institut de pathologie et de génétique à Gosselies. C'est le cas avec la trisomie 21, par exemple. Chez Juliette, ce n'était pas le cas. Et malheureusement, à l'époque, les tests ne permettaient pas de mettre la maladie dont elle souffrait en évidence. Mais la génétique évolue assez rapidement: on considère que tous les 5 ans, l'évolution technologique permet de proposer de nouveau tests plus pointus aux parents". Les médecins proposent donc aux parents de refaire des tests 5 ans plus tard.

"C'est comme si c'était un enfant d'un an et demi"

Entre temps, la fillette grandit, et son développement accuse un déficit. "On doit la laver et la changer car elle n'est pas autonome, explique son papa. On doit toujours être à côté d'elle, on ne peut jamais la laisser seule dans une pièce. Elle ne connaît pas la notion de danger. Pour comparer, c'est comme si c'était un enfant d'un an et demi". L'état de Juliette demande une prise en charge complète et ses parents doivent demander l'aide de spécialistes. "Nous l'avons placée dans un centre pour enfants polyhandicapés, indique son père. Là, on prend bien soin d'elle et cela nous permet de continuer à travailler". Benoît a donc pu poursuivre son métier d'instituteur à Auvelais, dans la commune de Sambreville.

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Le diagnostic tombe enfin: la fillette souffre du syndrome de Pitt Hopkins

Cinq ans plus tard, comme prévu, les parents retournent au centre de génétique. Et là, les nouveaux tests permettent de mettre un nom sur la maladie de l'enfant: il s'agit du syndrome de Pitt Hopkins, une maladie génétique rare qui touche le cerveau de l'enfant, impossible à dépister pendant la période de grossesse. Pour les parents de Juliette, l'annonce du terme de la maladie a été un soulagement. "Pendant toutes ces années, on ne savait pas à quoi s'attendre: la maladie était-elle dégénérative ou pas?, se questionnait Benoît. C'était très stressant. Aujourd'hui, on est fixés". Ce syndrome est causé par la mutation d'un gène (TCF4, ndlr). "Elle n'apparait que chez l'enfant, éclaire le médecin généticien. Lorsque le corps fabrique les spermatozoïdes et les ovules, notre ADN doit être recopié puisque l'on va transmettre la moitié de notre ADN à l'enfant et que l'autre moitié sera transmise par notre partenaire. Au moment de recopier l'ADN, s'il y a une sorte de faute de frappe, une petite mutation peut apparaître. La maladie arrive très souvent comme ça. Elle est donc présente depuis la conception et jusqu'à la fin de la vie".

Ce sont des enfants très souriants, mais ils peuvent connaître des périodes d'agressivité

La première réaction des parents de Juliette? Se documenter sur internet. Benoît et son ex-compagne veulent en savoir plus sur ce mystérieux syndrome qui, d'après les estimations du Dr. Lederer, ne toucherait en Belgique "que 30 à 50 personnes, selon les cas recensés". "En cherchant, on a trouvé un groupe Facebook créé en France par des parents d'enfants atteints, poursuit Benoît. Là, on a trouvé beaucoup de soutien. On voit qu'on vit les mêmes choses".

"Ce sont des enfants très souriants, … mais ils adorent faire des confettis avec les papiers!, explique Benoît. C'est particulier, ils passent tous par cette étape: Juliette adore déchirer tous les papiers qu'elle trouve". Ces enfants traversent aussi des périodes d'agressivité. "Elle peut frapper, quand elle est en colère, quand elle ressent du stress. Dans ces cas-là, on essaie de la rassurer. Lorsqu'on lui chante une chanson, on parvient à la calmer", dit-il dans un sourire.

"En général, ce sont des enfants "heureux", qui sourient beaucoup, confirme le médecin. Mais comme beaucoup d'enfants avec un déficit intellectuel, on va noter des périodes d'agression. Comme ils ne savent pas parler, ils vont exprimer leurs frustrations autrement: en étant agressifs par exemple. Ils sont aussi très sensibles au changement, ils aiment la routine".

"Chaque petite avancée de Juliette est une victoire"

Pour Benoît, chaque petit pas franchi par Juliette est un encouragement. "Elle progresse par palier, décrit Benoît. Elle ne parle pas, mais elle commence à marcher seule. Elle dit "Papa", "Maman" et c'est tout. On avance à son rythme, le peu de progrès qu'elle fait, c'est à chaque fois une victoire". "Ces enfants ont effectivement un déficit de développement assez sévère: ils marchent vers 4 à 6 ans et ont un déficit de langage très important, complète le généticien. On peut résumer en disant qu'ils souffrent de troubles du développement, d'un déficit intellectuel, qu'ils ont des fous rire inexpliqués, et qu'ils peuvent faire de l'hyperventilation quand ils grandissent ou faire des crises d'épilepsie".

Aucun traitement n'existe, mais Benoît veut garder espoir

Benoît voudrait s'adresser aux parents qui sont dans le même cas que lu et à tous ceux qui élèvent un enfant souffrant d'un handicap. Car contre le syndrome de Pitt Hopkins en lui-même, aucun traitement n'existe. "Je pense que nous devons garder espoir, encourage Benoît. On aime nos enfants, malgré les difficultés. Il faut du courage, car on traverse aussi des moments de désespoir".


 

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