En ce moment
 
 

A La Louvière, Rita et Giuseppe ont créé un concept de "cuisine rapide" durant le confinement, mais "tout est à l'arrêt"...

A La Louvière, Rita et Giuseppe ont créé un concept de "cuisine rapide" durant le confinement, mais "tout est à l'arrêt"...
© Facebook "Le Métro"
 
 

Cela fait 10 ans que Rita et Giuseppe tiennent un restaurant du côté de La Louvière. Ils ont récemment poussé le bouton orange Alertez-nous car ils se retrouvent dans une situation que beaucoup d’établissements Horeca connaissent bien : la pénurie de personnel. Après avoir lancé un nouveau concept de fastfood raffiné durant le second confinement, le couple voit son projet à l’arrêt par manque de main d’œuvre. Il lance un appel à l'aide.

"Nous avons créé un concept de cuisine rapide pendant le confinement qui a eu beaucoup de succès. Mais aujourd’hui, tout est à l’arrêt car nous ne trouvons pas de personnel", nous écrivaient Rita et Giuseppe via le bouton orange Alertez-nous. Ce couple de restaurateurs tient depuis 10 ans "Le Métro", un établissement Horeca situé à Strépy-Bracquegnies, du côté de La Louvière. Spécialisés dans la cuisine raffinée italienne, ils ont lancé, en décembre 2020, "Soul B.", un nouveau concept de cuisine rapide à emporter pour faire face à la fermeture des restaurants suite à la crise sanitaire. "C’est un concept inspiré du sandwich au homard, le lobster rolls, mais ici, c’est de la brioche au calamar et au porc effiloché. C’est un concept un peu fastfood mais raffiné, on a créé une nouvelle cuisine à part juste pour ça", explique Rita.

Si ces plats à emporter rencontraient un franc succès lors du confinement, la reprise des activités du secteur Horeca est venue tout chambouler. D’abord la réouverture des terrasses le 8 mai 2021, puis des restaurants en intérieur le 9 juin 2021, Rita et Giuseppe n’avaient plus le temps de se consacrer à ce nouveau concept. "Mon mari travaille en salle dans notre restaurant et moi je suis en cuisine. Mais on ne sait pas tout gérer, on a besoin de renfort", glisse la Louviéroise. C’est pourquoi ils ont décidé d’engager du personnel supplémentaire, notamment pour tenir "Soul B."

 Les gens ne veulent pas travailler les week-ends, mais dans l’Horeca c’est inévitable

Seulement voilà, depuis août 2021, le concept est totalement à l’arrêt. "Ça ne fonctionne plus car on ne trouve pas d’employés pour poursuivre l’activité", déplore celle qui a investi beaucoup d’argent dans ce nouveau concept.

Selon Rita, les gens ne sont plus motivés pour travailler. "Au niveau des serveurs, ça change tout le temps. Personne ne tient. Les gens ne veulent pas travailler les week-ends, mais dans l’Horeca c’est inévitable…", dit-elle. La restauratrice affirme avoir tout tenté pour recruter du personnel : "Nous avons mis des annonces au Forem, dans les intérims, dans des écoles. Je suis même allée voir dans l’école où j’ai étudié mais ils ne peuvent plus forcer les élèves à venir. Avant, on avait d’office des stages tous les week-ends, sinon on pouvait doubler notre année. Mais maintenant, les stages sont répartis différemment. Durant l’année, les élèves ne sont pas intéressés pour travailler", regrette-t-elle.

Une grosse pénurie dans le secteur

Il faut dire que le secteur Horeca – et ce n’est pas nouveau – rencontre une réelle pénurie de travailleurs en raison de la crise Covid. Ce n’est pas le Forem qui dira le contraire ! A ce jour, encore énormément de postes sont à pourvoir dans ce domaine. "Il y a plus de 600 opportunités pour l’Horeca, dont 300 en Wallonie", souligne Thierry Ney, porte-parole du Forem. Mais la situation actuelle n’est toujours pas très sereine pour les futurs travailleurs. La crise sanitaire n’est en effet toujours pas derrière nous, le secteur n’est pas encore totalement remis de ces longs mois de fermeture et pour couronner le tout, une quatrième vague du virus nous frappe à nouveau… "Cela reste très compliqué pour certains profils vu le contexte actuel… Néanmoins, ça reste un secteur accessible à bon nombre de personnes avec de faibles qualifications, à part pour le métier de cuisinier. Mais grosso modo, pour le reste, cela nécessite assez peu de prérequis", insiste le porte-parole du Forem.

Rita-et-Giuseppe
Giuseppe et Rita, couple de restaurateurs. © Facebook "Le Métro"

Selon lui, un certain nombre de demandeurs d’emploi pourraient correspondre aux offres actuelles. "Mais ce n’est pas évident, travailler dans l’Horeca, c’est travailler quand les autres s’amusent. Et avec les incertitudes actuelles, cela demande de redoubler d’efforts au niveau de l’argumentaire pour attirer les gens vers ce métier."

Pourtant – et cela pourrait paraître étonnant mais rassurant à la fois – les jeunes n’ont pas forcément été dissuadés de s’orienter vers ce secteur. Du côté de l’Institut Saint-Joseph à La Louvière, la section hôtelière "se porte globalement bien", d’après le directeur de l’établissement. Rizieri Meo recense plus de 100 inscrits dans cette option. "On frôle presque les 110 inscrits. C’est très bien pour l’école hôtelière. Car il y a 7 ou 8 ans, ça avait diminué, on tournait aux alentours de 90 inscrits."

Beaucoup de cuisiniers ou serveurs ont quitté la profession à cause du Covid. Ils ont été mis à l’arrêt trop longtemps et ils ont trouvé un emploi ailleurs

Dans cette école, les stages sont répartis sur trois à quatre semaines par année scolaire à partir de la quatrième secondaire. On est donc loin de la pratique obligatoire tous les week-ends, comme le prétendait Rita. "Je ne sais pas comment c’était avant mais ici, les stages sont obligatoires pour réussir l’année et ils sont répartis sur l’année : par exemple, pour les septièmes en option traiteur, le stage est en décembre car c’est plus intéressant pendant les fêtes. Pour les autres élèves, le stage se fait en fonction des congés, aux alentours de février ou mars", développe le responsable de l’établissement scolaire.

Les élèves sont chargés de trouver un stage par eux-mêmes, mais l’école peut les orienter en cas de difficulté. D’autres opportunités professionnelles peuvent également être envisagées en dehors de ces stages. "On reçoit régulièrement des propositions d’emploi d’établissements Horeca. On les affiche aux valves des élèves et libres à eux d’en faire ce qu’ils veulent. L’école n’intervient pas, c’est entre le restaurant et l’élève. Ça tourne quand même assez bien, ce qui permet aux élèves de goûter au monde professionnel", note Rizieri Meo.

Soul-B
Le nouveau concept de restauration rapide à emporter. © Facebook "Le Métro"

Mais malgré cela, le directeur comprend les difficultés du secteur aujourd’hui et cette pénurie depuis plusieurs mois. "Beaucoup de cuisiniers ou serveurs ont quitté la profession à cause du Covid. Ils ont été mis à l’arrêt trop longtemps et ils ont trouvé un emploi ailleurs, dans un autre secteur, dit-il. D’après ce que j’entends, beaucoup ont été engagés par la grande distribution, qui n’a pas dû être à l’arrêt, qui devait même engager davantage de personnes. Le salaire et les horaires sont mieux que dans l’Horeca."

"Et pour les jeunes, ils ont aussi leurs activités le week-end, poursuit le directeur. Et dans l’Horeca, ce sont quand même des gros horaires pour des enfants, car oui à 15 ou 16 ans, je considère qu’ils sont encore des enfants. Peu de personnes à 16 ans acceptent de faire ça, ils ont envie de sortir, de voir les copains, aller boire un verre ou aller au foot."

A l’IFAPME, les inscriptions sont en baisse

Il reste alors la possibilité de s’orienter vers des travailleurs en alternance, comme à l’IFAPME. L’avantage, là-bas, c’est la pratique sur le terrain. "Pour les jeunes, l’alternance est obligatoire, environ 1 jour par semaine de cours généraux, théoriques ou pratiques en centre. Et environ 4 jours par semaine de pratique en entreprise par semaine. C’est rémunéré", détaille David Delmotte, chargé de communication et marketing à l’IFAPME. "Pour les adultes, il y a la possibilité d’alternance ou obligation d’un stage de 250 heures par année." Mais là encore, Rita et Giuseppe ne sont pas convaincus. "On n’a jamais de nouvelles quand on envoie des mails, ça ne marche pas. Nos annonces ne fonctionnent pas", regrette le couple de restaurateurs.

Il faut dire que la pénurie touche également les centres de formation et cela se confirme dans le nombre d’inscrits. "Il y a 773 inscrits dans toutes nos branches Horeca pour cette année toute région confondue", souligne le chargé de communication et marketing à l’IFAPME. Au cours de l’année académique précédente, on en recensait tout de même 1.041, preuve d’une diminution importante. Du côté de La Louvière, les chiffres sont bas : au 31 octobre 2021, les données provisoires indiquaient 34 inscrits. C’est huit de moins qu’en 2020-2021. Mais cela peut s’expliquer par la présence d’écoles hôtelières dans la région. Il y a donc moins de potentiels candidats à engager au sein de l’IFAPME.

De plus, ce sont généralement les services de ces centres de formation qui s’occupent des contrats d’alternance, des conventions de stage et des stages de pratique professionnelle. "Certains Référents s’occupent de trouver des lieux de pratiques pour les apprenants grâce à leurs contacts. Certains apprenants effectuent les prises de contact de leur côté. Toutes les entreprises partenaires doivent remplir certains critères pour pouvoir accueillir un apprenant", développe David Delmotte. Mais certaines offres d’emploi sont malgré tout régulièrement publiées sur les réseaux sociaux de l’IFAPME. Aux élèves alors à manifester leur intérêt auprès des établissements concernés…

Et c’est précisément ce qui coincerait pour Rita : "Les gens ne veulent plus avoir de responsabilités ni même travailler. Nous ne savons plus quoi faire", désespère la gérante du restaurant louviérois. "Certaines personnes viennent ici et nous disent carrément qu’elles font ça pour se protéger et pouvoir continuer à toucher le chômage après", s’insurge-t-elle.

Dans l’idéal, Rita et Giuseppe cherchent des personnes bénéficiant déjà d’une expérience professionnelle. "J’ai besoin de déléguer mon travail donc j’aimerais des personnes qui savent travailler", précise la Louviéroise. Le couple souhaite en effet engager deux employés et une personne pour tenir le bar. "Si je pouvais trouver un chef, ça m’arrangerait pour pouvoir développer l’autre concept. Mais soit je reste dans le restaurant, soit je développe le concept. C’est l’un ou l’autre", conclut Rita.

Si vous êtes intéressés, n’hésitez pas à prendre contact avec le restaurant "Le Métro" de Strépy-Bracquegnies.


 

Vos commentaires