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La crise politique paralyse l'Irak en deuil après une semaine sanglante

 
 

L'Irak a entamé jeudi un deuil national après la mort de plus de 100 personnes, en grande majorité des manifestants réclamant la chute du gouvernement, qui tente de survivre à la crise politique engendrée par ce mouvement de contestation.

Le gouvernement, qui avait annoncé un remaniement pour répondre aux attaques auxquelles il fait face, n'a obtenu la confiance du Parlement sur seulement deux ministres, signe des divisions entre les différents blocs.

Le mouvement de contestation a touché la semaine dernière les trois quarts de l'Irak, les manifestants réclamant d'abord des emplois, des services fonctionnels et la fin de la corruption avant de demander "la chute du régime". Fait inédit dans le pays, il n'était issu d'aucun appel de parti ou figure religieuse.

Si les réseaux sociaux sont toujours inaccessibles jeudi --sauf par VPN quelques heures par jour--, de plus en plus de photos et de vidéos sur les violences lors des manifestations commencent à émerger.

On y voit des protestataires mortellement touchés par balles au torse ou au ventre, ou d'autres courir se mettre à couvert sous des feux nourris. Ou encore des canons à eaux qui envoient de l'eau brûlante.

- "Nos condoléances" -

Le deuil national décrété mercredi, deux jours après la fin des violences, n'a pas semblé apaiser la colère de la rue, dans un des Etats les plus riches en pétrole du monde mais où une personne sur cinq vit sous le seuil de pauvreté.

Ce deuil de trois jours "aurait dû être décrété il y a une semaine", s'emporte ainsi Mazen Abdallah, commerçant dans le centre de la capitale. "C'est comme si on nous disait: on vous a bien réprimés et maintenant on vous présente nos condoléances", poursuit cet Irakien de 38 ans.

Hossam al-Kaabi, un manifestant de 28 ans, considère lui le deuil national comme une reconnaissance par les autorités que "nos martyrs ne sont ni des saboteurs ni des pro-Saddam Hussein", dictateur déchu en 2003, dit-il, réfutant des accusations que lancent régulièrement les détracteurs du mouvement.

Depuis le déclenchement du mouvement le 1e octobre, les autorités accusent des "tireurs non identifiés" et des "saboteurs" infiltrés d'avoir tiré indistinctement sur manifestants et forces de l'ordre, faisant une centaine de morts et plus de 6.000 blessés.

Elles ont toutefois reconnu lundi un "usage excessif" de la force une nuit, dans un bastion chiite de Bagdad, en faisant porter la responsabilité à l'armée.

Les autorités ont annoncé des "enquêtes exhaustives" sur les violences mais Human Rights Watch (HRW) a rétorqué jeudi que "cela fait plus de dix ans que des gouvernements irakiens annoncent qu'ils enquêteront sur des abus des forces de sécurité sans jamais le faire".

Amnesty International a de son côté appelé les autorités à enquêter "correctement" sur l'"usage excessif et mortel" de la force par les services de sécurité.

Face à la contestation, le gouvernement d'Adel Abdel Mahdi a proposé des aides sociales pour faire baisser le chômage qui touche un jeune sur quatre, ordonné des aides au logement et ajouté les noms des morts de la semaine --manifestants et policiers-- à la liste des "martyrs" du pays, assurant une pension à leurs familles.

- Mini remaniement -

M. Abdel Mahdi a aussi indiqué qu'il allait proposer jeudi un remaniement ministériel au Parlement.

Dans l'après-midi, il a bien proposé cinq noms pour remplacer trois ministres, le ministre de la Santé démissionnaire et enfin attribuer le portefeuille de l'Education toujours vacant, près d'un an après la nomination du cabinet.

Mais seuls les candidats pour l'Education, Souha Khalil, membre d'un parti sunnite, et la Santé, Jaafar Allaoui, membre d'un parti chiite, ont obtenu la confiance du Parlement.

L'Assemblée, fortement divisée, est largement dépendante de la participation du bloc le plus important: les 54 députés de la liste de l'influent et très versatile leader chiite Moqtada Sadr, qui compte des ministres au gouvernement mais a réclamé il y a près d'une semaine la démission du cabinet.

Ils quittent régulièrement la salle, brisant le quorum et forçant ainsi à des reports. Jeudi, de nouveau, la séance a été levée et reportée sine die, en raison de leur départ.

Si la vie est revenue à la normale à Bagdad, deuxième capitale la plus peuplée du monde arabe, des membres des forces de l'ordre ont mis en place des barrages aux principaux axes du pays où ils fouillent les véhicules.

Dans le Sud, où les violences se sont calmées au même moment qu'à Bagdad, les pèlerins chiites continuent de converger, à pied pour la plupart, vers Kerbala, ville sainte à 100 km au sud de Bagdad.

Le 20 octobre, ils y commémoreront l'Arbaïn, le plus grand pèlerinage de l'islam chiite au monde, qui rassemble des millions de visiteurs, principalement d'Irak et d'Iran.


 

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