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Réfugiés: "un grand chantier devant nous" affirme Louis Gallois

 
 

Président de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars), en première ligne dans l'accueil des demandeurs d'asile en France, l'ex-patron d'EADS et de la SNCF Louis Gallois estime que la crise actuelle implique de s'atteler sans attendre au "grand chantier" en perspective pour améliorer l'accueil des réfugiés.

QUESTION: La Fnars, qui organise jeudi à Marseille une journée d'étude sur la réforme de l'asile, accueillera à cette occasion le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve: quelles sont les priorités sur lesquelles vous souhaitez attirer son attention?

REPONSE: "La priorité, ce n’est plus de se poser la question du +pourquoi?+. Maintenant, il faut se poser la question du +comment?+ Qu’est-ce qu’il faut faire? Quelle est l’ampleur de l’effort qui va être nécessaire? Je pense que nous allons entrer dans le concret, à la fois en nombre de places de centres d'accueil de demandeurs d'asile (Cada) –nous en demandions 20.000 avant l’afflux de migrants moyen-orientaux, je pense qu’il faudra aller au-delà de ces 20.000 (la France compte actuellement 26.000 places dans ces structures, ndlr). D’ores et déjà, il n’y a que 36% des demandeurs d’asile qui sont hébergés dans des Cada alors que ça devrait être la quasi-totalité.

Et il va falloir aussi que l’on se pose la question de savoir ce qui se passe quand la demande d’asile est acceptée ou refusée. Lorsqu’elle est acceptée, les personnes deviennent des réfugiés et à ce moment elles ont un certain nombre de droits: comment pourront-elles les exercer? Comment les loger? Comment leur donner accès au travail, à la langue française, etc.? Et pour les déboutés, comment les traite-t-on dignement? Débouté ne veut pas dire qu’on est sans droits. Il y a un grand chantier devant nous."

Q: Quel est votre sentiment face aux récentes manifestations de solidarité qui se sont exprimées en France ou dans d'autres pays européens?

R: "Ca révèle une France généreuse, ouverte, accueillante, qui fait contraste avec celle que nous présente constamment un certain discours politique sur les fermetures de frontières, sur le refus d’accueillir ces gens, sur cette frilosité extraordinaire vis-à-vis des problèmes des migrants, alors que nous ne sommes absolument pas submergés. Tout cela, c’est pour moi un élément d’optimisme.

Ceci étant dit, il faut bien se rendre compte qu’il ne s’agit pas d’une catastrophe naturelle et de l’accueil de gens pour quelques jours ou quelques semaines. Ce sont des gens qui vont s’installer en France et les solutions individuelles ne peuvent être que des solutions tout à fait provisoires: il faut prévoir un accueil beaucoup plus pérenne, plus stable, avec de l’accompagnement –parce que s’il n’y a pas d’accompagnement, il n’y a pas de réussite de l’intégration.

A Marseille on ne va pas parler uniquement de ce qu’on demande à l’Etat, on va parler aussi de ce que nous devons faire, nous. Mais il faut que ce soit un effort structuré, organisé dans le temps. C’est quelque chose qui va durer, ça ne peut pas être uniquement une opération d’urgence.

Q. Pensez-vous, comme certains l'assurent, que les initiatives actuelles vont pousser de plus en plus de réfugiés à fuir leur pays pour venir en Europe?

R. Je ne crois pas à cette théorie de l’appel d’air. Quand vous êtes menacé de mort dans votre pays, quand vos enfants sont sous les bombardements… vous ne vous préoccupez pas de savoir si vous allez être très bien accueillis, bien accueillis ou mal accueillis dans des pays sûrs, vous allez là où votre vie est protégée et j’espère que les gens considéreront qu’en France leur vie est protégée.

Mais il faudra aussi bien sûr organiser ça au niveau européen: la solution n’est pas française, elle n’est pas allemande, elle n’est pas autrichienne, elle est européenne et l’Europe doit être mise à contribution pour organiser cela.


 

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