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Des migrants quittent la Hongrie à pied, l'Europe sous pression

 
 

Plus de mille migrants bloqués à Budapest depuis plusieurs jours ont entrepris vendredi de rejoindre l'Autriche à pied, une scène d'exode inédite qui illustre la crise migratoire à laquelle les Européens tentent de répondre malgré leurs

divergences.

En réponse à cette marche, le gouvernement hongrois a annoncé vendredi soir mobiliser une centaine de cars pour transporter jusqu'à la frontière autrichienne ces migrants, ainsi que le millier d'autres présents dans un camp de réfugiés improvisé près de la gare Keleti de Budapest.

A 2.000 kilomètres de là, dans la ville syrienne de Kobané (nord), quelques dizaines de personnes en pleurs ont assisté à l'inhumation d'Aylan Kurdi, ce petit garçon de trois ans mort noyé pendant qu'il tentait avec sa famille de rallier l'île grecque de Kos, porte d'entrée dans l'Union européenne, et dont la photo du corps échoué sur une plage turque a envoyé une onde de choc dans le monde entier.

Le père de l'enfant a un temps tenu contre lui le petit corps avant de le déposer dans la fosse, a raconté un témoin.

La mère et le frère âgé de cinq ans d'Aylan, ainsi que neuf autres réfugiés syriens, ont également péri dans le naufrage de leur embarcation.

Quatre passeurs présumés soupçonnés d'être impliqués dans ce naufrage ont été inculpés et écroués vendredi par un tribunal de Bodrum (sud-est de la Turquie), ont rapporté les médias locaux.

En Europe, la Hongrie - où plus de 50.000 migrants sont arrivés pour le seul mois d'août - continuait de ressentir les vives secousses liées à ces arrivées sans précédent par leur ampleur.

Un Pakistanais de 51 ans est mort en fin d'après-midi, dans des circonstances pas encore élucidées, quand 350 migrants se sont échappés d'un train immobilisé depuis jeudi à Bicske, près de Budapest, d'où les autorités souhaitaient les transférer dans un camp.

- 'La Hongrie c'est terrible' -

Un cortège joyeux et déterminé de quelque 1.200 migrants, selon une évaluation de la police, dont des personnes en fauteuil roulant ou s'aidant de béquilles, s'est mis en marche vendredi midi vers la frontière autrichienne, située à quelque 175 kilomètres de la capitale Budapest. Les autorités ont en effet interdit tout départ de train vers l'Autriche et l'Allemagne, riches pays européens que la plupart des migrants rêvent d'atteindre.

"Le priorité numéro 1 est que le transport en Hongrie ne soit pas paralysé", a déclaré le chef de cabinet du Premier ministre populiste Viktor Orban, Janos Lazar, lorsqu'il a annoncé qu'une centaine de cars seraient assignés au transport de migrants, tout en précisant que cela ne signifiait pas forcément qu'ils pourraient quitter le pays.

"Le gouvernement attend la position du gouvernement autrichien sur les conditions d'entrée et de sortie", a-t-il dit.

Le cabinet du chancelier autrichien, Werner Faymann, a fait savoir que ce dernier s'entretiendrait avec M. Orban au téléphone samedi à 07H00 GMT au sujet de ce dossier.

"Nous ne laisserons pas tomber ces gens qui se trouvent dans une situation de détresse", a assuré une porte-parole du cabinet.

"Nous sommes heureux que quelque chose se débloque enfin. Le prochain arrêt c'est l'Autriche. Les enfants sont très fatigués, la Hongrie c'est terrible, nous devons en partir d'une manière ou d'une autre", s'est réjoui auprès de l'AFP Osama, un réfugié syrien de 23 ans présent dans le cortège.

Certains migrants faisaient le V de la victoire en marchant le long de l'autoroute. D'autres brandissaient des photos de la chancelière allemande Angela Merkel, qui a récemment assoupli les conditions d'asile pour les Syriens.

Par ailleurs, 300 migrants se sont brièvement échappés d'un camp de premier accueil situé près de la frontière serbe à Röszke, poussant Budapest à fermer provisoirement et partiellement ce poste-frontière autoroutier.

Dans ce contexte, le Parlement hongrois a voté d'urgence un durcissement de sa législation en matière d'immigration proposé par le Premier ministre. Les textes renforcent les possibilités de déploiement de l'armée aux frontières et rendent l'immigration illégale passible de trois ans de prison.

- Est contre Ouest -

La Hongrie critique vertement l'Allemagne, qui a décidé de ne pas renvoyer les réfugiés syriens vers leur pays d'entrée en Europe, ce qui crée selon elle un appel d'air.

"L'Europe doit arrêter de susciter des rêves et des espoirs irréalistes", a martelé son ministre des Affaires étrangères Peter Szijjarto.

La République tchèque et la Slovaquie ont pour leur part proposé d'ouvrir un couloir ferroviaire pour transporter les réfugiés syriens de la Hongrie vers l'Allemagne, si Budapest et Berlin sont d'accord.

Les Européens sont sous pression pour faire preuve de solidarité après que plus de 300.000 personnes ont traversé la Méditerranée depuis le début de l'année, et que plus de 2.600 sont mortes en effectuant ce périple.

Les divergences au sein de l'Union, "entre l'Est et l'Ouest" selon le président du Conseil européen Donald Tusk, révèlent un continent déchiré entre la fermeté face à l'afflux massif de déplacés à ses frontières extérieures et les appels à la solidarité.

"Nous vivons un moment de vérité dans l'Histoire européenne. Nous pouvons réussir, ensemble et unis, ou nous pouvons échouer chacun à sa propre façon, dans son propre pays, ou sur ses propres îles", a jugé le numéro deux de la Commission européenne, Frans Timmermans, en visite à Kos.

La Commission européenne va proposer aux Etats membres de l'UE de se répartir l'accueil de 120.000 réfugiés récemment entrés en Grèce, en Hongrie et en Italie.

Elle envisage aussi de demander des compensations financières - pour une durée limitée et "des raisons objectives" - aux pays qui refuseraient d'accueillir des réfugiés sur leur sol, selon une source européenne.

L'Allemagne, qui va recevoir un nombre record de 800.000 demandes d'asile cette année, et la France plaident ouvertement pour un système de répartition européen, la chancelière allemande Angela Merkel évoquant des "quotas contraignants".

Dans le même temps, à Madrid et à Barcelone, des centaines de personnes ont manifesté vendredi soir pour réclamer de davantage aider les migrants.


 

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