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Hasna Aitboulahcen, de "cow-girl" des quartiers à jihadiste

Hasna Aitboulahcen, de "cow-girl" des quartiers à jihadiste
Vue exrérieure en date du 18 novembre 2015 à Saint-Denis de l'immeuble dans lequel étaient retranchés des jihadistes dont Hasna Ait Boulahcen, soupçonnée d'avoir actionné son gilet d'explosifs lors dJOEL SAGET
 
 

Une enfance maltraitée, une jeunesse de fêtarde, puis elle troque soudainement son chapeau de cow-boy pour le voile intégral: Hasna Aitboulahcen, cousine d'Abdelhamid Abaaoud, "cerveau" présumé des attentats de Paris, fait partie des trois jihadistes tués mercredi dans l'assaut policier à Saint-Denis.

Au cœur de la nuit, dans la ville endormie, le Raid attaque un appartement où se terre Abaaoud. Un policier hurle: "Il est où ton copain?" Une voix de femme: "C'est pas mon copain!" Suivent des détonations.

La scène, filmée par un riverain, passe en boucle à la télévision. "Onde de choc" dans la Cité des 3.000, à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), où l'on reconnaît la voix, mais aussi la photo de la jeune femme: Hasna Aitboulahcen, 26 ans. Sa mère habite le quartier.

La jeune femme est tuée, son cousin également tandis qu'un troisième homme, encore non-identifié, meurt en kamikaze.

"Parfois excentrique", elle avait hérité d'un surnom, "+chapeau de paille+, parce qu'elle en portait souvent", raconte Sofiane, un voisin. "Bavarde, avec la tchatche, un peu fofolle aussi, instable, elle pouvait surgir devant toi et commencer à faire un rap!"

Les autres voisins décrivent un "garçon manqué" au "physique quelconque", en "blue jean, casquettes, lunettes".

Tout bascule il y a six mois. Elle commence à porter "le jilbabe", tenue recouvrant l'intégralité du corps excepté le visage, "puis, un mois après, elle était passée au niqab", témoigne auprès de l'AFP un homme qui se présente comme son frère et demande l'anonymat.

"Elle s'était fabriqué sa propre bulle, elle ne cherchait aucunement à étudier sa religion, je ne l'ai jamais vue ouvrir un Coran", poursuit-il.

Même stupéfaction à Creutzwald, ville ouvrière de Moselle, où Hasna Aitboulahcen rendait parfois visite à son père de 74 ans. Là-bas, elle laisse le souvenir d'une fêtarde, "avec son petit chapeau de cow-boy et ses santiags", qui "fumait de temps en temps et buvait dans les soirées", raconte un ancien ami, Jérôme.

Le père, musulman très pratiquant, avait quitté le foyer familial pour travailler chez PSA en Lorraine. Il est actuellement au Maroc.

- "Il y avait le diable" -

Née le 12 août 1989 à Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine), Hasna Aitboulahcen a traversé une enfance maltraitée avant d'être placée en famille d'accueil entre les âges de 8 et 15 ans.

"Au début, ça se passait bien. C'était une gamine comme les autres", dit à l'AFP sous couvert d'anonymat sa mère d'accueil. Un détail cependant: aucun geste de tendresse chez la fillette. "Elle voulait pas..."

Autre bizarrerie: "Elle s'enroulait toujours dans une couette la tête cachée. Elle disait qu'il y avait le diable la nuit".

Vers 11 ans, les choses empirent: "Pour moi, ça venait de chez elle", des visites une fois par mois chez ses parents, explique la mère d'accueil, décrivant une fille tiraillée entre deux familles.

Elle se rappelle notamment le 11 septembre 2001, lorsqu'elle "applaudissait devant la télé".

Peu à peu, l'adolescente ne fait "que ce qui lui plaît", hurle parfois, fait le mur. Elle quitte cette famille d'un coup, à 15 ans.

"Quand elle est partie, je me suis dit: +Elle est perdue+", raconte la mère d'accueil, qui a pleuré en découvrant sa photo à la télévision. "Mais ça ne m'a pas trop étonnée. Elle en a toujours voulu à tout le monde..."

"En grandissant, elle a manqué de repères (...), multipliant les fugues, les mauvaises fréquentations", résume son frère. Selon une source proche du dossier, elle a été inquiétée par la justice dans une affaire de stupéfiants.

Après sa brutale radicalisation, "un lavage de cerveau" selon sa mère, 58 ans, rencontrée jeudi par l'AFP, la jeune femme "passait son temps à tout critiquer", "n'acceptait aucun conseil", "entretenait des relations plus que douteuses", se rappelle son frère.

"Elle était en permanence avec son smartphone sur Facebook et Whatsapp. +Fais ta vie, je fais la mienne+, elle disait". Il y a trois semaines, elle était selon lui partie vivre chez une amie, à Drancy.

Son corps déchiqueté, retrouvé dans les décombres, a été identifié grâce à ses empreintes digitales.


 

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