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Etats-Unis: à J-73, Donald Trump dans l'ornière

 
 

C'était censé être le nouveau Trump. Donald Trump a tenté de changer ces deux dernières semaines, afin d'élargir son électorat mais à deux mois et demi de l'élection présidentielle, les Américains ne semblent pas croire à cette énième métamorphose.

Sur la forme, le candidat républicain à la Maison Blanche est plus discipliné, ses discours sont écrits et il les concentre sur son adversaire, la démocrate Hillary Clinton, qu'il cogne sans retenue en raison de soupçons de trafic d'influence à la fondation caritative Clinton lorsqu'elle dirigeait la diplomatie des Etats-Unis.

Sur le fond, il a poli son message, il parle plus d'économie et a tendu la main aux minorités, principalement les Noirs et les Américains d'origine hispanique.

Cette apparence moins abrasive et plus tolérante viserait deux objectifs: d'une part, récupérer des voix dans ces communautés, qui jusqu'à présent ont plébiscité les démocrates. D'autre part, persuader les Blancs de la classe moyenne écoeurés par son verbe outrancier de revenir au bercail républicain.

"Il essaie de faire les deux à la fois, et il échouera probablement dans les deux cas", prédit Larry Sabato, politologue vétéran des campagnes présidentielles américaines.

Le milliardaire populiste a choisi un angle d'attaque risqué contre Hillary Clinton: il l'accuse d'être sectaire et raciste, en plus d'être corrompue.

"Les politiciens démocrates ont dirigé presque toutes les grandes villes américaines depuis 50, 60, 70, 80, 90 ou 100 ans. Leurs politiques n'ont produit que plus de pauvreté, de chômage, d'écoles défaillantes", a-t-il déclaré jeudi. "Elle s'en fiche, elle est trop occupée à amasser de l'argent, à truquer le système et à prendre les voix noires et hispaniques pour acquises (...) tout en leur disant: +merci et à dans quatre ans!+"

Il faudra attendre quelques semaines pour voir si cette offensive se révèle fructueuse. Les sondages, jusqu'à présent, montrent qu'Hillary Clinton fait un peu mieux auprès des minorités que Barack Obama en 2012, avec 77% des intentions de vote selon l'institut Quinnipiac. Mais il paraît peu probable qu'elles oublient en quelques semaines plus d'un an de vitriol xénophobe.

"Jamais depuis George Wallace je n'ai vu de candidat dont le nom provoque un tel mouvement de recul chez les minorités", dit Larry Sabato. George Wallace n'est pas une référence: cet ancien gouverneur de l'Alabama porta les couleurs ségrégationnistes à la présidentielle de 1968.

- Classes populaires blanches -

Quant aux Blancs, Donald Trump fait moins bien que son prédécesseur de 2012, le patricien Mitt Romney.

Certes, 58% des Blancs sans diplôme le soutiennent, séduits par son bagout populiste. Ce bloc d'électeurs désabusés, marginalisés par la mondialisation et rejetant les élites, représentait environ 45% de l'électorat en 2012, selon le New York Times.

Mais cet avantage auprès des "cols-bleus" blancs ne suffit pas à compenser son déficit de popularité chez les Blancs des classes supérieures. C'est chez ces Blancs diplômés qu'Hillary Clinton est montée de façon spectaculaire cet été. Selon le dernier sondage ABC/Washington Post, 50% d'entre eux soutiennent la démocrate, contre 42% début juillet.

En résumé: les Blancs sans diplôme de la "rust belt", la "ceinture de la rouille" frappée par la désindustrialisation, ne font pas le poids contre la coalition pro-Clinton de minorités et de Blancs éduqués.

"Toute la semaine, il a essayé de rassurer les républicains blancs modérés et leur prouver qu'il n'était pas raciste", analyse Larry Sabato. Or "ces gens-là valorisent la civilité".

Hillary Clinton s'est d'ailleurs évertuée à dissiper tout malentendu quant à ce qu'elle considère être le "vrai" Trump: un populiste qui a réveillé l'extrême-droite américaine et les pires éléments nationalistes du mouvement conservateur.

- Hésitation -

Donald Trump se retrouve ainsi déchiré entre l'ancien Trump tonitruant, qui a galvanisé une tranche de l'électorat conservateur, et le nouveau Trump, dont les Américains modérés doutent de la sincérité.

Le dernier épisode de la semaine illustre ce dilemme stratégique.

En l'espace de 48 heures, Donald Trump a promis un "assouplissement" de son projet de lutte contre l'immigration clandestine puis, face au tollé déclenché à droite par son geste d'ouverture... un "durcissement".

"Où est la cohérence quand il n'arrive même pas à expliquer la proposition centrale de sa candidature?" s'exclame Larry Sabato.

Donald Trump devrait clarifier ses propositions migratoires la semaine prochaine. Une énième mise au point pour une candidature décidément sans cap.


 

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