Le groupe Etat islamique a repris pied dans la ville kurde syrienne de Kobané, cinq mois après en avoir été chassé, et est entré dans celle de Hassaké, dont elle tente de s'emparer depuis un mois, indique jeudi l'Observatoire syrien des droits de l'Homme. Et dans le sud syrien, ce sont des groupes rebelles, dont des jihadistes de la branche syrienne d'Al-Qaïda, qui accentuent la pression sur les forces du régime de Bachar al-Assad à Deraa, berceau de la révolution de 2011.
Le groupe Etat islamique a lancé jeudi des attaques dans deux villes du nord de la Syrie, reprenant pied à Kobané et entrant dans Hassaké, quelques jours après avoir reculé face aux forces kurdes.
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), des combattants de l'EI sont revenus dans Kobané, la ville frontalière de la Turquie où le groupe ultra-radical avait subi un retentissant revers en janvier. Il en avait été chassé, notamment par les forces kurdes, au terme d'un siège de quatre mois qui avait fait de cette cité un haut-lieu de la lutte anti-jihadiste.
Les jihadistes ont perpétré un attentat suicide au véhicule piégé près du poste-frontière avec la Turquie. Des combats les opposaient jeudi aux forces kurdes dans le centre de la ville dévastée, selon l'OSDH.
"Des membres (de l'EI) se sont inflitrés dans Kobané autour de 5 heures du matin", a indiqué le bureau du gouverneur de la province turque de Sanliurfa, qui a assuré que ces infiltrations n'avaient pas eu lieu depuis la Turquie mais depuis la Syrie.
Selon l'OSDH, l'attaque suicide a coûté la vie à au moins cinq personnes. La province de Sanliurfa a fait état de l'hospitalition en Turquie de 41 blessés de l'explosion, dont un est décédé à l'hôpital.
Pour Idris Nasan, un responsable de la ville de Kobané (Aïn Al-Arab en arabe), l'EI "cherche à semer la confusion pour venger leur défaite (de janvier) et pousser les Kurdes à la fuite". Selon lui, des habitants des environs de Kobané sont prêts à venir prêter main forte aux combattants kurdes.
Fin 2014, l'EI avait tenté pendant quatre mois de prendre Kobané avant d'en être chassé par les forces kurdes appuyées par des raids aériens de la coalition internationale conduite par les Etats-Unis.
A Hassaké, chef-lieu de la province éponyme frontalière de la Turquie et de l'Irak, des jihadistes se sont emparés de deux quartiers auparavant sous contrôle du régime, d'après l'OSDH, qui dispose d'un large réseau de sources à travers la Syrie.
Au moins 20 jihadistes et 30 membres des forces du régime ont été tués lors de violents affrontements toujours en cours jeudi dans cette ville dont le régime syrien et les forces kurdes se partagent le contrôle.
L'EI y avait entamé une offensive le 30 mai mais avait jusque présent été repoussé. Un attentat suicide contre un point de contrôle tenue par une milice pro-régime lui a cette fois permis d'entrer dans la ville.
"Les civils dans le sud de la ville fuient vers les quartiers nord", contrôlés par des forces kurdes, a expliqué le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane.
Ces offensives de l'EI dans des secteurs kurdes syriens interviennent peu de temps après des revers enregistrés par l'organisation jihadiste dans un secteur du nord syrien, notamment la perte de Tall Abyad, une ville qui permettait au groupe extrémiste sunnite d'acheminer des armes et combattants depuis la Turquie voisine vers Raqa (nord). Les forces kurdes ne sont plus qu'à 55 km de ce qui est la "capitale" de l'EI en Syrie.
Pour Charles Lister, expert au Brooking Doha Centre, "les évènements à Kobané et Hassaké relèvent d'une stratégie classique de l'EI, par laquelle des attaques inattendues et spectaculaires sont lancées comme opérations de diversion", visant dans ce cas, "à détourner les Kurdes de Raqa".
A l'opposé du pays, dans la partie méridionale près de la Jordanie, des forces du régime dans la ville de Deraa sont attaquées par une coalition de rebelles, dont des jihadistes du Front Al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda, et des combattants du groupe islamiste Ahrar al-Cham.
Les médias officiels ont fait état de bombardements contre des positions loyalistes dans cette cité déjà partiellement sous contrôle de rebelles.
La majorité de la province de Deraa est contrôlée par des groupes rebelles, qui y ont enregistré des gains territoriaux ces dernières semaines.
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