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Où va le Venezuela? opposants et partisans à nouveau dans la rue

 
 

Opposants et partisans du président socialiste du Venezuela Nicolas Maduro se défient une nouvelle fois mercredi dans les rues de Caracas, à l'occasion de grandes manifestations qui laissent craindre des violences alors que la crise politique s'aggrave.

Pour les antichavistes (du nom de Hugo Chavez, président de 1999 à son décès en 2013), qui ont promis "la mère de toutes les manifestations", il s'agira de la sixième mobilisation depuis début avril, en faveur d'élections anticipées et en défense du Parlement, la seule institution qu'ils contrôlent.

En moins de trois semaines, cette vague de manifestations a fait cinq morts et des dizaines de blessés, l'opposition dénonçant la répression des forces de l'ordre qui ont arrêté plus de 200 personnes.

Dans ce pays qui est l'un des plus violents au monde, la précédente série de protestations anti-Maduro, en 2014, s'était soldée par un bilan officiel de 43 morts.

Le président du Parlement, Julio Borges, a appelé mardi les forces armées à être "loyales" à la Constitution en laissant les opposants défiler pacifiquement.

Une référence à la "loyauté inconditionnelle" à Nicolas Maduro proclamée lundi par le chef des armées et ministre de la Défense, Vladimir Padrino Lopez. Un soutien crucial alors que l'armée est un acteur incontournable du jeu politique au Venezuela, 11 ministères sur 32 étant dirigés par des militaires ou d'anciens militaires.

Assurant ne pas leur réclamer une "rébellion" ni "un coup d'Etat", M. Borges a demandé aux militaires de "cesser les abus", "le harcèlement" et "la répression".

L'opposition a défini 26 points de départ de la manifestation, qui tentera de parvenir jusqu'aux bureaux du Défenseur du peuple, situés dans le centre de Caracas et considérés comme un bastion chaviste.

Les autorités ont prévenu qu'ils ne laisseraient pas les manifestants aller jusqu'à cette zone où aura lieu l'autre défilé, celui des partisans de M. Maduro.

"Tout Caracas sera prise par les forces révolutionnaires (pro-Maduro, ndlr), ne nous chamboulez pas ça", a lancé Diosdado Cabello, un des dirigeants les plus puissants du parti socialiste au pouvoir, qui accuse l'opposition d'encourager la violence dans la rue pour mener un coup d'Etat.


Inquiétude en Amérique latine

Le vice-président du Parlement Freddy Guevara a appelé les opposants à "faire déborder les rues pour dire à Maduro que nous ne permettrons pas une dictature".

Lors des précédentes protestations, ce sont justement les tentatives des forces de l'ordre pour bloquer le passage des manifestants qui avaient dégénéré en violences.

Inquiets, onze pays latino-américains ont demandé à Caracas de "garantir" le droit de protester pacifiquement, un appel qualifié par le gouvernement vénézuélien d'"ingérence grossière".

Le président de la Colombie voisine, Juan Manuel Santos, a lui aussi exprimé sa "sérieuse inquiétude", appelant le Venezuela "à la sagesse".

Mais Nicolas Maduro ne semble pas prêt à calmer le jeu: après avoir annoncé le déploiement de militaires en prévision des mobilisations de mercredi, il a décrété le renforcement des milices civiles, qui compteront 500.000 membres avec "un fusil pour chacun" en vue d'une éventuelle "intervention étrangère".

La vague de protestations a démarré le 1er avril après la décision de la Cour suprême, réputée proche de Maduro, de s'arroger les pouvoirs du Parlement, déclenchant un tollé diplomatique qui l'a poussée à faire machine arrière 48 heures plus tard.

L'opposition dénonce une tentative de coup d'Etat mais paradoxalement cet épisode lui a aussi donné un nouveau souffle, l'amenant à dépasser ses divisions intestines, et il a relancé la mobilisation populaire à ses côtés, assoupie ces derniers mois.

"L'opposition est plus unie que jamais. C'est une force importante et nouvelle. Il est probable que la manifestation (de mercredi) soit la plus grande contre le chavisme. Mais nous ne pouvons pas prédire l'impact que cela aura" ensuite, déclare l'analyste Luis Vicente Leon.

Certains observateurs pensent que le gouvernement, en signe d'accalmie, dévoilera bientôt la date des élections régionales, repoussées sine die depuis 2016. Mais l'opposition veut plus, exigeant un scrutin présidentiel anticipé.

Toute échéance électorale est de toute façon une menace pour M. Maduro, dont sept Vénézuéliens sur dix souhaitent le départ, asphyxiés par la crise économique qui vide les rayons des supermarchés et dope l'inflation, attendue à 720,5% fin 2017 par le FMI.


 

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