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Sebastian Kurz, l'homme pressé de la politique autrichienne

 
 

Ministre à 27 ans, plus jeune dirigeant d'Europe à 31 ans, l'Autrichien Sebastian Kurz a maîtrisé toutes les étapes de son ascension politique, jusqu'au premier imprévu de sa carrière: une éviction prématurée de la direction du pays.

Après une parenthèse de quatre mois en marge du pouvoir, le chef des conservateurs a toutes les chances de renouer avec son parcours de "Wunderwuzzi", enfant prodige de la politique, en remportant les législatives anticipées de dimanche pour lesquelles il est largement favori.

Les déboires de son allié d'extrême droite, le parti FPÖ, dont le leader a dû démissionner après des déclarations compromettantes filmées à Ibiza, ne faisaient certainement pas partie du plan de carrière que ce dirigeant aux traits lisses d'adolescent a soigneusement orchestré.

Le retentissement international de l'Ibizagate a fait imploser en mai le gouvernement qu'il avait formé avec le FPÖ en 2017. Mais l'homme pressé de la politique autrichienne n'est pas sorti affaibli de cette péripétie.

Selon l'analyste Johannes Huber, si l'Autriche remet son destin entre les mains d'un jeune homme né en 1986, d'un père technicien et d'une mère enseignante, c'est parce qu'elle est séduite par son "art parfaitement maîtrisé de la rhétorique".

Surfant sur le rejet des figures traditionnelles de la politique, Sebastian Kurz a dépoussiéré l'image des conservateurs autrichiens, au pouvoir sans interruption depuis 1987, leur imposant une nouvelle couleur (le turquoise pâle) et l'appellation "Liste Kurz". Cette conquête à la hussarde du vénérable parti chrétien-démocrate a nourri les comparaisons avec la stratégie suivie par Emmanuel Macron à l'élection présidentielle française de 2017.

- Idole des séniors -

Lors d'un meeting en septembre à Baden, près de Vienne, Maria Ehrenhofer, une retraitée de 66 ans, dit le trouver "dynamique". "Il fait ce qu'il dit et ce qu'il dit est bien", selon cette électrice.

"Il apporte de l'élan à la République", affirme Johannes Hotschke, un entrepreneur de 61 ans, qui loue sa volonté de réforme.

L'entourage du chancelier fait valoir qu'en musclant son discours sur l'immigration, il a contenu l'ascension du FPÖ qui en 2016 caracolait en tête des sondages et se voyait en position de remporter des élections nationales.

A une Autriche prospère mais déstabilisée par l'afflux migratoire, le jeune dirigeant a proposé la fermeture des frontières de l'Europe et un durcissement des conditions d'asile en Autriche.

Du boycott du pacte de l'ONU sur les migrations à la réduction des minimaux sociaux pour les demandeurs d'asile, la rafale de mesures anti-immigration votée sous son mandat ont fait de lui une personnalité clivante, à l'image de son homologue hongrois Viktor Orban, qui voit en lui l'architecte d'un "pont" entre la droite et l'extrême droite.

Son style de gouvernance duplique des idées défendues par l'extrême droite et certains dirigeants populistes d'Europe centrale, tout en évitant les provocations sémantiques et en revendiquant ses convictions pro-européennes.

Il a rarement recadré le FPÖ, alors que les dérapages xénophobes de l'extrême droite ont écorné l'image de l'Autriche auprès de ses partenaires européens. Cette passivité lui a valu le sobriquet de "chancelier silencieux".

L'ancien chef de la formation libérale Neos, Matthias Strolz, le dépeint en "opportuniste sans vision", la figure de proue d'un nouveau courant "national-conservateur".

En avril, Reinhold Mitterlehner, l'ancien chef de l'ÖVP renversé par M. Kurz, s'était aussi inquiété de voir l'Autriche devenir sous sa gouvernance une "une démocratie autoritaire".

Malgré son allure juvénile, Sebastian Kurz bat des records de popularité chez les personnes les plus âgées. Son profile de gendre idéal s'adresse principalement à cette clientèle électorale, les plus de 45 ans représentant 65% des électeurs en Autriche.

Originaire de Vienne, il aime par ailleurs rappeler ses racines campagnardes, "comme s'il voulait dire aux habitants des zones rurales qu'il était l'un des leurs", estime Johannes Huber. Et qu'il comptait les représenter encore longtemps au sommet du pouvoir.


 

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