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Justice: prison ferme pour les membres d'un réseau de convoyeurs de migrants

Justice: prison ferme pour les membres d'un réseau de convoyeurs de migrants
Une statue de l'allégorie de la Justice au tribunal de RennesDAMIEN MEYER
 
 

Des peines de six mois avec sursis à cinq ans de prison ferme ont été prononcées jeudi à Rennes à l'encontre de 18 personnes, dont des skippers, impliquées dans un réseau de convoyage vers l'Angleterre, par la mer, de migrants albanais.

L'enquête de la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Rennes avait permis de révéler quelque 16 passages par vedette ou voiliers, entre janvier 2012 et janvier 2013, permettant à au moins 127 Albanais de rejoindre l'Angleterre depuis des ports bretons ou normands.

Ces "gens ont l'espoir de quitter leur pays pour trouver en Grande-Bretagne leur eldorado", et dans ce but sont prêts à payer "des sommes colossales", a souligné lors de l'audience qui a commencé lundi, la procureure de la République Anne Fourmel, évoquant des sommes de 6.000 euros, et jusqu'à 20.000 euros pour une famille.

Avant l'énoncé des peines, le tribunal a précisé avoir tenu compte du fait que la sécurité physique des personnes avaient été mise en cause "de manière modérée" et que celles-ci avaient été traitées "avec dignité".

L'enquête a commencé après l'arraisonnement, en janvier 2013, d'un voilier qui avait quitté le port de Cherbourg avec 14 Albanais à bord. Aucun de ces ressortissants n'était titulaire du visa indispensable à l'entrée en Grande-Bretagne, un pays qui ne fait pas partie de l'espace Schengen.

Les 18 personnes étaient poursuivies pour le délit d'aide au séjour irrégulier en bande organisée. Le tribunal a aussi retenu l'atteinte à la souveraineté du Royaume-Uni.

Les peines les plus lourdes ont été prononcées à l'encontre des organisateurs du réseau.

Philippe Collin, un chef d'entreprise des Côtes-d'Armor, dont la procureure a souligné le "rôle central" dans ce réseau, a été condamné à cinq ans de prison, 150.000 euros d'amende et à la confiscation de ses biens.

"Il va matériellement organiser des passages, déposer des clandestins" au port d'embarquement, rétribuer des skippers, avait notamment énuméré la procureure lors de son réquisitoire. M. Collin a toujours contesté avoir reçu de l'argent dans cette affaire.

Celui qui est soupçonné être, selon la procureure, l'alter ego de M. Collin, un homme qui se fait appeler Bujar Curri, né au Kosovo, a été condamné à cinq ans de prison, 150.000 euros d'amende et à une interdiction du territoire

La procureure avait estimé que "le rôle du binôme Curri-Collin était indissociable". "Il sont impliqués dans l'ensemble des voyages, sur la même période, donc il n'y a pas de différence sur l’appréciation de leur rôle", avait-elle dit.

- 'organisations criminelle' -

Leurs deux avocats avaient réclamé une "décision équitable" les concernant.

Aleksander Ruspi, un Albanais dont la procureure avait pointé "le rôle colossal" avec des "contacts avec toutes les personnes en amont de l'arrivée des migrants en France", a eu lui aussi une peine de cinq ans de prison ainsi qu'une interdiction définitive du territoire français.

Edmond Rapi, un ressortissant albanais en fuite mais dont la procureure de la République, Anne Fourmel, avait mercredi pointé "le rôle majeur dans l'implantation en Bretagne de "cette organisation criminelle" visant à "exploiter la misère humaine", a aussi été condamné à cinq ans de prison.

Tout comme un autre responsable du réseau en fuite, Lundrin Hasani.

Un mandat d'arrêt a été lancé à leur encontre, et il sont aussi interdits de territoire.

Enfin 13 skippers et marins, la plupart des Bretons, étaient poursuivis dans cette affaire. Ce sont eux qui convoyaient les Albanais vers la Grande-Bretagne, le skipper et le marin se partageant 1.000 euros par passager.

La cour les a condamnés à des peines allant de six mois de prison avec sursis à 36 mois de prison dont 18 mois ferme pour un des skippers soupçonnés d'avoir recruté les autres skippers, qui a aussi été condamné à 15.000 euros d'amende.

Il avait lui-même réalisé deux passages, avec 20 clandestins au total.

La procureure avait réclamé des peines en fonction du nombre de passages réalisés et des amendes de 500 euros par passager convoyé.

Une femme, soupçonnée par les enquêteurs de faire partie des organisateurs du réseau, s'était suicidée août 2013. Un autre skipper mis en cause dans cette affaire s'est lui aussi suicidé.


 

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