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Sur l'île de Lesbos, le défi du secteur touristique face aux migrants

 
 

Sur l'île grecque de Lesbos en mer Egée, le tourisme peine à survivre devant le nombre inédit de migrants arrivant sur ses côtes, les entrepreneurs locaux se battant quotidiennement pour satisfaire leur clientèle estivale habituelle.

"Les gens se sentent évidemment désolés pour eux, moi aussi, mais ce n'est pas bon pour notre entreprise quand ils (les migrants) viennent sur notre plage", se plaint Teresa Dalvadanis, propriétaire suédoise d'un restaurant sur l'une des plages de Mytilène, chef-lieu de Lesbos.

"Ils veulent prendre une douche, ils se couchent sur la plage... C'est un gâchis pour tous: nous voulons les aider mais on ne peut pas", ajoute cette femme de 45 ans.

Dans un hôtel, près du port, un Syrien demande, dans un anglais excellent, s'il y a des chambres disponibles, en montrant ses papiers provisoires fournis par les autorités de l'île, qui théoriquement, lui permettraient d'avoir un logement.

On lui répond que tout est pris et il quitte les lieux en jetant un regard sur une clé inutilisée derrière la réception.

La crise migratoire a frappé de plein fouet la Grèce en crise. Depuis janvier, 160.000 migrants - un nombre inédit - sont arrivés au pays via les côtes turques toutes proches.

La Grèce a été de nouveau critiquée par les Nations unies et des organisations humanitaires pour le manque d'infrastructures et des mauvais traitements infligés aux migrants, dont nombreux sont contraints de dormir dans la rue.

- "Ce n'est pas notre responsabilité" -

Les autorités locales disent avoir atteint leurs limites.

"C'est impossible pour la mairie ou le gouvernement de gérer ce problème qui affecte toute l'Europe, tout le monde", déplore auprès de l'AFP Sypros Galinos, maire de l'île.

La majorité des arrivées sont des réfugiés qui fuient la Syrie en raison de la guerre civile, qui a provoqué la mort d'au moins 240.000 personnes et contraint quatre millions de personnes à quitter le pays.

Les rues près du port de Mytilène sont pleines de Syriens, Afghans, Irakiens, ou Somaliens qui attendent pendant plusieurs jours de prendre le ferry pour Athènes avant de continuer leur route via la Macédoine, pays frontalier, vers l'Europe occidentale.

Le gouvernement grec a affrété des ferries pour transférer les milliers de migrants au Pirée, grand port près d'Athènes.

Les conditions de vie sont un peu meilleures dans les centres d'accueil de l'île, mais ceux-ci sont déjà pleins.

"C'est un beau pays et les autorités essaient de faire leur mieux..., mais il leur faut plus d'argent et de gens pour participer à l'organisation", juge Muhammed al-Hussein al-Murati, réfugié de 35 ans d'Alep (Syrie), qui a finalement réussi mercredi à trouver un ferry pour Athènes transportant 2.500 personnes.

Lesbos souffre d'une baisse du nombre de touristes grecs de 40% en raison de la hausse récente des taxes et les difficultés financières mais le nombre des touristes étrangers a augmenté.

- Des affaires en or -

Teresa Dalvadanis dit que son entreprise souffre d'une baisse de 50% de chiffre d'affaires par rapport à 2014 en raison à la fois des migrants et de la crise.

Cependant certains entrepreneurs s'adaptent mieux à leur nouvelle clientèle.

"Ces gens ont commencé à utiliser les hôtels, les taxis, les ferries, tout, on gagne d'eux ce qu'on a perdu des autres", explique Giannis Samiotis, président de l'union locale des agences de voyage.

Le magasin d’Irène Bolka, à côté du port, est toujours plein de Syriens, Afghans, Irakiens. Les souvenirs ne les intéressent pas, mais elle fait des affaires en or avec la vente de tentes.

"Nous ne vendons que des équipements de camping, nous n'avons pas de touristes mais que des migrants", dit-elle.

Un peu plus loin, une file d'attente se forme devant un restaurant de kebab. Il en est ainsi tous les soirs jusqu'à sa fermeture à minuit.

Le propriétaire a embauché un portier pour organiser sa clientèle.

Des entrepreneurs occasionnels essaient aussi d'en tirer profit en "recyclant" les moteurs ou d'autres parties des embarcations de fortune utilisés par les migrants, ou en leur vendant de la nourriture et des habits.

M. Galinos assure que certains de migrants sont "très qualifiés". "Ils pourraient aider à la reconstruction économique non seulement de la Grèce mais aussi d'autres pays européens", dit-il.


 

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