Donald Trump entame mardi la déconstruction du bilan de Barack Obama sur le climat, avec la volonté affichée de donner un coup de pouce aux énergies fossiles, suscitant des interrogations sur l'attitude des États-Unis vis-à-vis de l'accord de Paris, signé fin 2015 par plus de 190 pays.
Dans une séquence chargée en symboles, le président américain, qui a ouvertement mis en doute la réalité du réchauffement climatique, se rendra au siège de l'Agence de protection de l'environnement (EPA), à quelques centaines de mètres de la Maison Blanche, pour signer le "décret sur l'indépendance énergétique".
Ce décret contribuera à s'assurer que l'énergie soit "abordable et propre" afin de "favoriser la croissance économique et les créations d'emplois", selon le résumé d'un responsable de la Maison Blanche.
Le texte, qui vise à réduire "les obstacles inutiles" dans ce secteur, ordonne en particulier un réexamen de la mesure phare de son prédécesseur démocrate: le "Clean Power Plan" (projet pour une énergie propre).
Ce dernier, qui a pour but d'accélérer la transition énergétique, impose aux centrales thermiques des réductions de leurs émissions de CO2 de 32% d'ici 2030 par rapport à 2005. S'il entrait en vigueur, il se traduirait par la fermeture de nombre de centrales à charbon (les plus anciennes et les plus polluantes).
Il est cependant, pour l'heure, bloqué par la justice, qui avait été saisie par une trentaine d’États, majoritairement républicains.
- "Magnifique charbon propre" -
Réexaminer ce projet "prendra un certain temps", a reconnu l'exécutif, évoquant en particulier les procédures de consultation du public en vigueur à l'EPA.
Même s'il est en déclin, le charbon reste une composante importante du paysage énergétique américain. Les centaines de centrales à charbon réparties sur le territoire fournissent environ un tiers de l'électricité du pays, à égalité avec le gaz naturel et devant le nucléaire et l'hydroélectricité.
Donald Trump évoque régulièrement devant ses partisans sa volonté de relancer l'exploitation du "magnifique charbon propre". "De nombreux mineurs vont retrouver du travail", a-t-il affirmé le semaine dernière dans le Kentucky.
Mais la plupart des experts sont sceptiques et doutent que le décret qui sera signé mardi puisse se traduire par des créations nettes d'emplois.
"Cela n'aura pratiquement aucun impact", juge le professeur James Van Nostrand de l'université de West Virginia, rappelant que le déclin du charbon est d'abord lié à la hausse des coûts d'exploitation et à la concurrence accrue du gaz naturel et des énergies renouvelables. "Démanteler l'EPA et se débarrasser de la règlementation ne fera pas renaître l'industrie du charbon".
Le nombre d'emplois dans ce secteur est passé de 88.000 en 2008 à 66.000 en 2015, selon le ministère de l’Énergie.
- Paris, un "
mauvais accord" -
Le décret qui doit être signé par le magnat de l'immobilier supprime par ailleurs une demi-douzaine de décisions de M. Obama liées au climat, telles que celle portant sur l'interdiction de nouvelle exploitation de charbon sur des terres fédérales.
La Chambre de commerce américaine a salué avec force l'annonce de la remise en cause du Clean Power Plan, jugeant qu'il était "non seulement illégal, mais mauvais pour les familles et les entreprises américaines".
Le Natural Resources Defense Council estime en revanche que cette initiative est "une trahison de nos intérêts nationaux". "C'est une attaque en règle contre les protections dont nous avons besoin pour éviter une catastrophe climatique", a déploré l'ONG.
Pour Bob Ward, du Grantham Research Institute à la London School of Economics, renoncer au Clean Power Plan rendrait "pratiquement impossible pour les Etats-Unis d'atteindre leurs objectifs de l'accord de Paris" (baisse de 26% à 28% des émissions d'ici 2025 par rapport à 2005).
Si cette analyse ne fait pas l'unanimité, le signal envoyé par l'administration Trump au reste de la communauté internationale est clair: le Washington ne déterminera pas sa politique énergétique en fonction des enjeux climatiques.
Le nouveau patron de l'EPA, Scott Pruitt, qui a récemment affirmé, à rebours du consensus scientifique international, que les émissions de CO2 n'étaient pas une des causes majeures du réchauffement en cours, a estimé dimanche que Paris avait "été tout simplement un mauvais accord".
Un éventuel retrait des Etats-Unis, qui représenterait une véritable déflagration, fait l'objet d'âpres débats au sein de l'administration. "C'est en cours de discussion", a indiqué lundi soir un responsable de l'exécutif sous couvert d'anonymat.
Les État-Unis sont le deuxième plus gros émetteur de gaz à effet de serre derrière la Chine.
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