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Les prisons? "Les politiques n’en ont rien à foutre"… alors que "c’est un incubateur du radicalisme religieux"

Les prisons? "Les politiques n’en ont rien à foutre"… alors que "c’est un incubateur du radicalisme religieux"
 
 

Sur le plateau de C’est pas tous les jours dimanche, nos chroniqueurs ont débattu de la grève qui touche nos prisons. Ils ont surtout parlé du fond du problème : la surpopulation, le manque d’effectifs et la vétusté des lieux. Avec ce constat : presque rien n’a été fait depuis 30 ans. Pour eux, ce désintérêt des politiciens, s’il s’explique facilement, est une erreur : c’est dans nos prisons que se radicalisent certains et qu’un petit délinquant passe au crime organisé.

"A la prison de Forest, les pompiers ont déjà établi que l’électricité n’est pas aux normes et si un incendie se produit, tout le monde meurt asphyxié. Le bâtiment n’est pas stable, rats, souris, cafards, etc. Qui travaille dans ces conditions-là ?", demandait Alain Raviart, expliquant en ces quelques mots pourquoi les gardiens de prison n’en peuvent plus. "Et qui séjourne dans ces conditions-là ?", renchérissait Christophe Giltay. En effet, "s’il y a parfois des tensions entre les gardiens et les détenus, les droits de détenus et des gardiens sont finalement très liés", expliquait Michel Henrion.


"Je pense que le pouvoir politique n’en a rien à foutre"

Alain Raviart pointait du doigt nos politiciens, qui ont laissé pourrir le dossier, et donc les conditions de travail des uns et de détention des autres, depuis trop longtemps : "Par rapport aux droits de l’homme c’est scandaleux. Il y a une responsabilité politique toutes familles confondues, mais très fort sociale chrétienne", notait-il, puisque les ministres de la justice sur les 30 dernières années ont été socio-chrétiens pendant 20 ans, ce qui est encore le cas aujourd’hui avec Koen Geens, CD&V. "Je pense que le pouvoir politique n’en a rien à foutre, c’est ça la vérité", assénait-il.


... parce que le citoyen n'en a rien à foutre?

Il était rejoint par Christophe Giltay sur ce point, mais il ne se montrait pas étonné. "Pourquoi on n’a pas investi plus dans les prisons ? Parce que c’est pas populaire, c’est tout. Parce que n’est pas porteur sur le plan électoral. Il n’y a pas que la Belgique d’ailleurs. C’est partout pareil."


"Si vous regardez les tueurs qui ont opéré récemment, ils sont tous passés par la case prison"

Une attitude qui risque de nous coûter cher. En témoigne l'actualité récente. "Le discours dominant veut que les détenus aient bien mérité ce qu’ils ont. Mais si on ne mise pas sur la réinsertion, dans la rue ça va péter… et c’est ce qui se passe. C’est un incubateur du radicalisme religieux notamment", rappelait Alain Raviart. François Troukens, ex-braqueur de fourgons et détenu, reconverti dans les médias, l'a confirmé dans la suite du débat. "Il faut mettre des moyens éducatifs, des éducateurs. Il faut que la prison soit plus dure, mais plus juste et que quelqu’un qui rentre en prison en ressorte construit et pas radicalisé dans la haine et devienne un terroriste. Et c’est ce qui se passe. Si vous regardez tous les tueurs qui ont opéré, que ce soit à Toulouse, la place Saint-Lambert, Charlie Hebdo, ou Bruxelles récemment, ce sont des gens qui sont passés par la case prison, qui se sont radicalisés dans la haine. Je ne parle pas de religion moi, mais d’une haine de la société parce qu’on les a rejetés. Je ne dis pas qu’ils ne doivent pas payer leur prix à la justice, mais ils doivent le payer de manière construite. Le problème c’est qu’on fait un combat face à soi et qu’on n’est pas accompagné. Dans d’autres pays, on vient vous chercher dans votre cellule, on vous propose de faire des études universitaires ou une formation et de sortir avec un diplôme. En Belgique, il y a très peu de choses mise en place et en fait vous êtes souvent seul face à un écran de Playstation à fumer des joints et à vous radicaliser dans la haine. Dans nos prisons, il y a des imams qui ne sont peut-être pas habilités. Le jour des attentats, je peux vous assurer que dans les prisons, ça clame de joie et c'est pas normal."


Une grève utile pour faire bouger les choses?

De quoi faire prendre conscience au citoyen belge qu’il doit s’intéresser au sort de nos prisons, car il est lié à celui de notre société une fois les détenus libérés? Espérons-le. Pour Michel Henrion, cette grève annoncée au finish pourrait en être le déclencheur, au niveau politique en tout cas. "C’est peut-être paradoxal, mais c’est la grève qui ouvrira peut-être une amélioration des conditions de détention et de vie dans les prisons. Parce que le point qui revient tout le temps dans les témoignages, c’est la surpopulation." "Pourquoi ils ne font pas grève en Flandre ? Il faut bien comprendre que le taux de surpopulation est 2 fois plus élevé en Wallonie et 4 fois plus élevé à Bruxelles. Il faut savoir aussi que le nombre de gardiens a dramatiquement diminué sous cette législature", ajoutait Alain Raviart.

Des problèmes que le ministre Koen Geens va devoir s'atteler à régler...


 

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