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Toujours moins d'éléphants en Afrique: certains pays ne veulent pas qu'on leur impose un système de protection

Toujours moins d'éléphants en Afrique: certains pays ne veulent pas qu'on leur impose un système de protection
 
 

Les ONG de défense de la nature entendent profiter de la Convention internationale sur le commerce des espèces sauvages menacées d'extinction pour faire entendre leur voix. Elle a lieu tous les trois ans et s'est ouverte hier à Johannesburg. Le problème des éléphants et des rhinocéros sera au centre des discussions.

La population des éléphants d'Afrique est au plus bas depuis 25 ans, principalement en raison du braconnage, a alerté dimanche l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), alimentant un vif débat sur les mesures de protection à prendre. L'Afrique compte actuellement environ 415.000 éléphants, soit 111.000 de moins que lors de la dernière décennie, selon le rapport de l'UICN fondé sur 275 mesures à travers le continent. "La forte hausse du braconnage, qui a débuté il y a une dizaine d'années, est la principale cause du déclin" de la population d'éléphants, explique l'UICN dans un communiqué.

La disparition croissante des zones naturelles d'habitation des pachydermes, à cause de la déforestation et de l'urbanisation, menace aussi l'espèce, précise l'organisation. Les braconniers chassent les éléphants pour revendre à prix d'or leurs défenses en ivoire, principalement sur les marchés asiatiques. "C'est choquant mais pas surprenant", juge le directeur général de l'UICN, Inger Andersen, alors que les signaux d'alarme sur la hausse du braconnage et la baisse du nombre d'éléphants se sont multipliés ces dernières années.

Il protège, à des degrés divers, 5.600 espèces animales et 30.000 plantes

Ce rapport alarmant a été divulgué devant les 3.500 délégués de la Cites, la convention internationale sur le commerce d'espèces sauvages menacées d'extinction, qui s'est ouverte samedi à Johannesburg, et qui doit débattre de nouvelles mesures de protection. La Cites est un accord international destiné à protéger la faune et la flore menacées par la surexploitation commerciale. Ce traité, signé par 182 pays et par l'Union européenne, est entré en vigueur en 1975. Il protège, à des degrés divers, 5.600 espèces animales et 30.000 plantes.

Le braconnage, notamment des éléphants et des rhinocéros, alimente un trafic extrêmement lucratif évalué à 20 milliards de dollars par an, selon la Cites, ce qui en fait le quatrième commerce illégal sur la planète après celui des armes, de la contrefaçon et des êtres humains.

"Particulièrement inquiet de l'impact des grands travaux d'infrastructure sur l'habitat des éléphants"

Le débat sur les mesures de protection en faveur des éléphants, animaux emblématiques des savanes africaines, est un des plus attendus, certains pays plaidant pour une restriction du commerce de l'ivoire, d'autres pour une libéralisation. Chris Thouless, un expert de l'UICN, s'est dit "particulièrement inquiet de l'impact des grands travaux d'infrastructure sur l'habitat des éléphants", évoquant notamment les routes en Afrique centrale.

Pour Sue Lieberman, vice-président de Wildlife Conservation Society (Société pour la préservation de la vie sauvage), "les dernières données statistiques montrent que les gouvernements doivent prendre les mesures nécessaires, y compris fermer leurs marchés nationaux d'ivoire d'éléphant", afin d'empêcher les trafiquants de "blanchir" l'ivoire illégal.

"C'est de l'arrogance, cela rappelle du néo-colonialisme et nous ne pouvons l'accepter"

Mais des pays d'Afrique australe revendiquent le droit de gérer leurs propres populations de pachydermes, sans se voir imposer des mesures par la Cites. Stephen Mwansa, le numéro deux du ministère zambien du Tourisme, a rappelé que la population des éléphants d'Afrique australe se portait bien. "Nous gérons bien" la situation. "Comment pouvez-vous venir nous dire comment réguler notre marché intérieur?" s'est-il agacé. "C'est de l'arrogance, cela rappelle du néo-colonialisme et nous ne pouvons l'accepter", a-t-il déclaré samedi.

En 1989, la Cites avait complètement interdit le commerce international d'ivoire des éléphants d'Afrique. Ce qui avait permis à la population de remonter, si bien que les éléphants du Botswana, de Namibie, d'Afrique du Sud et du Zimbabwe étaient repassés à un niveau de protection moins fort à la fin des années 1990.

"La Cites devrait nous aider à réussir nos programmes de protection plutôt que d'imposer des politiques impérialistes"

La Namibie et le Zimbabwe demandent maintenant à être autorisés à vendre des stocks de défenses d'ivoire prélevés sur des éléphants décédés de mort naturelle, afin de financer des projets de protection lancés par des communautés locales. Une proposition soutenue par l'Afrique du Sud. Mais une coalition de 29 pays africains réclame au contraire d'interdire de nouveau totalement le commerce de l'ivoire. Ce que la ministre de l'Environnement du Zimbabwe Oppah Muchinguri a qualifié de "violation des droits souverain des nations""La Cites devrait nous aider à réussir nos programmes de protection plutôt que d'imposer des politiques impérialistes", a-t-elle déclaré, disant parler au nom des pays de la région qui abritent les trois quarts des éléphants africains.

Contrairement à l'Afrique australe, l'Afrique de l'Est a vu sa population d'éléphants s'effondrer presque de moitié à cause du braconnage, tandis que l'Afrique de l'Ouest ne compte plus qu'un petit nombre de majestueux pachydermes.


 

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