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"Viande végétale": La Vie parie sur le gras et lève 25 millions d'euros

 
 

Jetées dans une poêle, les tranches de bacon d'imitation laissent échapper un arôme familier, puis leur partie grasse commence à crépiter de façon prometteuse, sous le regard enthousiaste de Nicolas Schweitzer, cofondateur et PDG de La Vie, jeune pousse française de substitut à la viande.

Alors que la commercialisation de ses succédanés végétaux de bacon et de lardons commence à peine, la start-up vient de lever 25 millions d'euros auprès de fonds d'investissement et de célébrités engagées pour la protection de la planète dont l'actrice Natalie Portman.

"Nous sommes les seuls au monde aujourd'hui à avoir réussi à développer un gras végétal qui va cuire, frire, infuser et caraméliser" comme le ferait du gras animal, vante Nicolas Schweitzer, en recevant l'AFP dans les locaux parisiens de la start-up jusqu'ici très discrète.

Au bout de quelques minutes, le simili-bacon fumé est cuit: texture croustillante, goût familier. C'est ensuite au tour des "lardons", coupés fins, de passer à la poêle. Bien grillés mais assez salés.

"On proposera aussi une version moins salée", précise Vincent Poulichet, 32 ans, scientifique expert du gras, l'autre cofondateur de La Vie. Ses lardons ont obtenu un Nutri-Score C. "Moins bien que des brocolis mais mieux que des lardons de porc", relève l'emballage de la barquette.

Le marché des substituts de viande à base de végétaux est encore peu développé en France où l'un des principaux freins reste celui du goût.

- 5.000 essais -

Fondée en 2019, La Vie a eu l'idée, pour se différencier d'autres marques végétales, de travailler la question du gras qui donne un goût caractéristique à la viande animale.

Elle a breveté une technologie de gras à base de plantes qui, "après trois ans de recherche-développement et 5.000 essais, réussit le pari un peu fou de reproduire le goût du porc", revendique Nicolas Schweitzer, 34 ans.

La marque utilise aussi un nombre limité d'ingrédients, pour répondre aux attentes nutritionnelles et aux critiques sur les aliments ultra-transformés.

Le gras des substituts de bacon et de lardons de La Vie est composé d'huile de tournesol et d'eau travaillés selon un process particulier. Le maigre contient de la protéine de soja (européen), du sel, des colorants (peau de radis ou de tomate) et des arômes naturels.

"C'est en faisant goûter nos produits qu'on a réussi à monter ce tour de table extraordinaire", explique le PDG. "Tout de suite, les investisseurs disaient +ah oui, quand même!+".

Des fonds de capital-risque (Seventure, Oyster Bay, Partech...) ont investi. De même que, à titre personnel, plusieurs patrons de start-up européennes à succès (Oatly, Vinted, Back Market, BlaBlaCar).

Natalie Portman s'est elle aussi laissée séduire après avoir testé les produits chez elle aux États-Unis.

Côté atouts, La Vie fait valoir que ses produits sont "meilleurs" pour la santé des consommateurs ("11 fois moins de graisses saturées" que le porc), pour celle de la Planète ("7 fois moins d'émissions de gaz à effet de serre") et enfin pour celle "du cochon".

La jeune pousse n'est pas seule sur le marché. "Le Bon végétal" de Herta détenu par Nestlé est très présent au rayon "traiteur végétal". Il y a aussi Fleury Michon, des marques distributeurs, et Beyond Meat y débarque.

La start-up française "Happyvore" (ex-Nouveaux fermiers) propose elle aussi des simili-lardons végétaux, moins gras et coupés plus gros, et des simili-saucisses, des "aiguillettes végétales" de poulet...

- Marchés britannique et américain -

Les substituts de lardons de La Vie sont vendus chez Carrefour, et pour 2022 la marque vise la totalité des enseignes de grande distribution en France. Elle est aussi servie dans des restaurants vegans et végétariens.

"Convaincre les restaurateurs de faire goûter nos produits à leurs clients est une priorité", relève Nicolas Schweitzer. Il compte nouer des partenariats avec les géants de la restauration rapide.

Au-delà de la France, la marque veut se lancer dès avril au Royaume-Uni et compte le faire "rapidement" sur l'important marché américain, indique Romain Jolivet, directeur marketing.

La start-up, dont les produits sont élaborés en Vendée par son partenaire industriel Sodebo, va doubler ses effectifs, à 60 salariés.


 

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