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Valérie, Wivinne, Aurélie: une femme est tuée par son conjoint, son ex-compagnon ou un inconnu tous les 10 jours en Belgique

Valérie, Wivinne, Aurélie: une femme est tuée par son conjoint, son ex-compagnon ou un inconnu tous les 10 jours en Belgique
 
 

Tous les dix jours, en Belgique, une femme est tuée sous les coups d'un homme. Dans le monde, plus de 80 femmes sont tuées chaque jour par leur compagnon ou par leur ex-conjoint. En Belgique, il n'y a pas de statistiques officielles, notamment, parce que le terme féminicide, soit le fait de tuer une femme parce qu'elle est femme, n'existe pas juridiquement.

Le féminicide est un phénomène bien réel en Belgique. On peut notamment citer celui de Lucie et Valérie Leisten, une mère et sa fille mortellement poignardées par l'ex de cette dernière à Plombières le 23 août 2018. Elles devenaient alors les 24e et 25e victimes de féminicide en Belgique en 2018. Des centaines de personnes étaient présentes à leurs funérailles. La jeune femme avait plusieurs fois alerté la police, ses proches et voisins des menaces de mort que proférait son ex-compagnon à son encontre. Mais les institutions censées la protéger, telles que la police et la justice n'ont pas été capables de le faire.

Céline Caudron, coresponsable de la Plateforme Mirabal, qui recense les meurtres de femmes liés à leur condition de femmes, expliquait l'été dernier que "la plupart des femmes tuées le sont par des compagnons ou des ex-compagnons. Cela s'inscrit dans un cycle de violences présentes depuis plus longtemps. Il ne s'agit pas de disputes, de conflits, mais de rapports de pouvoir et de domination", signale-t-elle.



Les asbl recensent bénévolement les féminicides: la police ne le fait pas

Depuis 2017, 98 femmes  ont été victimes de féminicide en Belgique. Ce  chiffre très interpellant n’est pas officiel : la police ne recense pas ces cas, ce sont les asbl qui, bénévolement, scrutent la presse et les réseaux sociaux pour les comptabiliser. Il y a donc un chiffre noir, c'est-à-dire que de très nombreux cas ne sont jamais médiatisés et passent dès lors inaperçus.

Notre système juridique est-il aujourd’hui à la hauteur des enjeux ? "La convention d'Istanbul engage la Belgique à tous les niveaux de pouvoir à mettre en place une série de mesures pour faire en sorte de lutter contre les violences, rappelle Hafida Bachir, secrétaire politique de l'asbl Vie féminine. Et on en est très loin. La Belgique est un pays complexe au niveau instituionnel".

Pour cette membre de l’ASBL, il y a clairement un  manque de coordination à tous les niveaux de pouvoir. Mais ce terme féminicide est encore peu connu. Dans sa définition large, il correspond au meurtre d’une femme en raison de sa condition féminine, aux "meurtres à mobile mysogyne", selon les deux auteures qui ont théorisé ce terme en 1992, à savoir la criminologue britannique Jill Radford et la sociologue américaine Diana Russell dans leur ouvrage "Femicide, The Politics of Woman Killing ("Féminicide, l'aspect politique du meurtre des femmes", non traduit).

L'utilisation de ce terme, reconnu par des instances internationales comme l'Organisation des Nations unies (ONU) ou l'Organisation mondiale de la santé (OMS), est toutefois restée timide en Europe, sauf en Espagne et en Italie.

Ce terme devrait-il compléter notre arsenal juridique ? "Ca sort de l'ombre un fait social, estime Hafida Bachir. Cela inscrit les meurtres de femmes comme un fait social et pas comme un fait divers".

Certains avocats pénalistes pensent que cela ne "changerai rien"

Pour plusieurs juristes interrogés par notre rédaction, une introduction dans le droit serait "inutile" et ne "changerait rien", le code pénal reconnaissant la circonstance aggravante de meurtre par conjoint, passible de la réclusion criminelle à perpétuité. "Je ne crois pas fondamentalement que ça changera, car si vous avez un meurtre c'est une peine qui ira de 20 à 30 ans, si vous avez un assassinat vous pouvez aller jusqu'à la perpétuité, donc l'arsenal est très lourd, considère Pierre Chomé, avocat pénaliste. Il y a la symbolique et une circonstance aggravante qui existe déjà dans la loi".

Pour cet avocat, les outils légaux existent en Belgique mais peinent à être utilisés efficacement.


 

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