En ce moment
 
 

Le président de Solidaris lance une réflexion globale: "Il faut démarchandiser les soins de santé!"

 
 

Jean Pascale Labille, secrétaire général de la mutuelle Solidaris, était l'invité de Fabrice Grosfilley ce matin au micro de Bel RTL.

Fabrice Grosfilley: On est a peine sorti de la 2ème vague qu'on redoute la 3ème... On en n'a pas fini avec le covid-19? 

Jean Pascale Labille: Il faut rester prudent. L'ensemble des gestes barrières qu'on nous a préconisés doivent être maintenus. Et au delà de ça, il faudra avoir une réflexion de fond sur le monde dans lequel on est aujourd'hui. Ces pandémies vont faire parties de nos vies et on va devoir s'adapter à cela. Et c'est là tout l'enjeu!

Même avec la vaccination en 2021, on va devoir maintenir les gestes barrières, éviter la bise, les soirées débridées, la fermeture des cafés et restaurants? 

Jean Pascale Labille: On verra à ce moment-là. Moi à titre personnel, tout ça me manque énormément! Et je pense que ça manque à beaucoup de monde. Alors faisons en sorte qu'on puisse atteindre cette période de vaccination vers le deuxième trimestre de 2021, et on retrouvera certainement une vie plus normalisée sur ce plan là. Mais il faudra rester prudent même après la vaccination. Et ça prendra du temps!

Quand vous dites qu'il va falloir s'adapter, ça veut dire quoi? Que pour notre système de santé, les mutualités, il va falloir revoir un certain nombre de pratiques?

Jean Pascale Labille: Oui, par exemple l'hôpital de demain, pour qu'il puisse faire face à l'afflux majeur de patients comme on l'a vu. 20% des patients covid vont en soins intensifs contre 6-7% pour en temps normal. Donc à quoi ressemblera l'hôpital de demain?

Avec Solidaris, on a lancé toute une réflexion là-dessus, avec Marius Gilbert et Emmanuel André qui ont une profondeur d'analyse absolument remarquable. Et cette réflexion sert à voir quel sera le système de santé de demain, qu'est ce qu'on va mettre en place, etc.

Vous avez lancé un groupe de réflexion avec eux?

Jean Pascale Labille: Effectivement, une cellule de 'veille pandémie'. Mais aussi sur le long terme, pour pouvoir s'adapter à la situation qu'on connait aujourd'hui. Est ce que ces patients atteints de covid vont développer d'autres pathologies ? C'est une vraie analyse qu'on doit mener. L'information qu'on a à donner à la population aussi. On est devant une crise inédite, on n'a plus connu ça depuis longtemps, on a oublié que les maladies infectieuses faisaient parties de notre vie finalement!

Ca veut dire qu'on va devoir repenser le financement de la sécurité sociale, l'organisation des hôpitaux, mais aussi multiplier le nombre de lits en soins intensifs par exemple? 

Jean Pascale Labille: C'est une réflexion à avoir peut être sur un hôpital plus modulaire qui pourra faire face à un afflux de patients pendant une période déterminée et qui retrouvera un "rythme de croisière" ensuite.

Le financement de la sécurité sociale est déjà sur la table. Je salue ce qu'il s'est passé avec ce nouveau gouvernement. On a aujourd'hui un nouveau ministre qui prend le choses à bras le corps, on a un refinancement de la sécurité sociale donc c'est sur chemin qu'on doit aller, mais sur le long terme. Ce n'est pas uniquement sur la période covid qu'il faut assurer le refinancement de la sécurité sociale et des soins de santé.

Il faut les démarchandiser! La santé ce n'est pas une marchandise: on touche à la vie humaine, à ce qu'il y a de plus chère chez les gens! Donc c'est dans cette direction qu'il faut aller."

Le refinancement qu'on a déjà acquis dans cette législature ne sera pas suffisant?

Jean Pascale Labille: Il sera suffisant pour atteindre les objectifs fixés, mais si on veut avoir de nouvelles initiatives, il faudra probablement avoir d'autres sources de financement. Mais je salue quand même le refinancement tel qu'il a été fait.

Cette réflexion que vous lancez, c'est pour Solidaris ou c'est pour toutes les mutualités ? 

Jean Pascale Labille: C'est pour l'ensemble des mutualités mais il faut toujours un premier de cordé. Donc c'est Solidaris le premier de cordé, qui a lancé cette réflexion.

Concrètement, les mutualités ont fait quoi pendant ces derniers mois? Quel était votre rôle? 

Jean Pascale Labille: Les deux rôles de base des mutualités. A savoir, d'une part continuer à effectuer les paiements des hôpitaux et des affiliés.

Et puis ensuite, rassurer, coacher, accompagner, être là pour donner les conseils dont les gens ont besoins dans une société fracturée. Les gens sont en grandes difficultés, je pense aux jeunes notamment. La santé mentale sera certainement l'une des grandes priorités dans les mois et années à venir.

L'un des grands enjeux dans les mois qui viennent, c'est la vaccination: à la fois son organisation logistique mais aussi la nécessité de convaincre les citoyens de se faire vacciner. Les mutualités participeront au processus? 

Jean Pascale Labille: Effectivement, on nous a sollicité pour les campagnes d'infos qui auront lieu dans quelques jours, au début de l'année. On va jouer un rôle très important sur la communication et on a bien entendu répondu présent.

C'est quoi une bonne communication sur le vaccin ?

Jean Pascale Labille: C'est de démystifier les craintes et peurs que les gens peuvent avoir aujourd'hui. On a oublié qu'on vivait dans un monde avec des maladies infectieuses, il faut rappeler que ça peut exister et donc objectiver l'information qui sera donnée.

Ce sera quoi les canaux d'infos, des spots à la tv et à la radio ou sur le terrain?

Jean Pascale Labille: Tous les canaux possibles et inimaginables, y compris le virtuel bien sûr. C'est important de convaincre l'ensemble de la population. On est inter-connectés, donc si une partie ne se fait pas vacciner ou ne respecte pas les gestes barrières, on ne va pas éradiquer la pandémie.

Sur ce vaccin, l'autorité européenne devrait donner son feu vert lundi. D'après vos informations, vous pensez qu'on sera prêt pour vacciner en Belgique dès la semaine prochaine? 

Jean Pascale Labille: Je pense qu'on sera prêt. Je ne sais pas si ce sera la semaine prochaine mais en tout cas, on va être prêt et les précautions nécessaires auront été prises.

Il y a un autre volet de la crise où les mutualités ont été directement impliquées, c'est le système de traçage, vous étiez affiliés aux call center. Est-ce que le système aujourd'hui fonctionne ou on peut l'améliorer? 

Jean Pascale Labille: On peut certainement l'améliorer puisque c'est la première fois que ce système est mis en place. On a du adapter le nombre de personnes qui travaillaient sur ce tracing à cause des cas de covid qui baissaient et augmentaient. Aujourd'hui, je pense qu'on atteint tout doucement la bonne taille. 

Mais il faudra être préventif. C'est l'un des grands éléments de cette crise: on doit avoir un système de santé préventif plutôt que curatif. Il le sera aussi mais il faut qu'il soit beaucoup plus préventif pour pouvoir prévoir une épidémie et donc le nombre de personnes affectées au tracing. 

Pour les gens qui ne respectent pas la quarantaine ou ne se font pas tester, qu'est ce que vous préconisez? 

Jean Pascale Labille: Le système coercitif ne produira que de mauvais résultats. C'est la persuasion qu'il faut, expliquer aux gens pourquoi on leur impose cela.

On ne doit pas sanctionner quelqu'un qui refuse de se mettre en quarantaine?

Jean Pascale Labille: Il faut lui expliquer pourquoi. Sur les lockdown party, là,je pense qu'il faut des mesures et sanctions beaucoup plus importantes, mais pour le reste de la population, je ne veux pas qu'on soit dans un système de coercision comme celui là.


 

Vos commentaires