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"Le vaccin, c'est comme une cassette": un chercheur explique comment la science a produit un vaccin aussi vite

 
 

La vaccination devient LE sujet majeur de la crise sanitaire. Certains doutent de l'efficacité réelle des injections, d'autres pensent que la science a été trop vite. Mais comment expliquer cette production en un an à peine ?

La vaccination pose énormément de questions, en Belgique comme ailleurs. Alors que notre pays se prépare aussi à vacciner la population, en étalant les injections selon des publics prioritaires, Moncef Slaoui, chercheur en immunologie nommé par Donald Trump pour trouver un vaccin contre le coronavirus, est revenu dans "C'est pas tous les jours dimanche sur le processus de production de ce vaccin. 

Il était présent pour répondre aux inquiétudes légitimes, avancées notamment par des infirmières. "Je suis inquiète parce que c'est un nouveau produit qui n'aura pas été beaucoup testé", nous explique par exemple Sophie Gobert, infirmière à domicile. "Je pense que cela a été trop vite, j'aime bien avoir un certain recul et je laisse un peu faire les autres avant de me lancer moi-même, même si je me réjouis de me faire vacciner pour vivre à nouveau normalement", précise-t-elle. "La troisième phase doit être la plus longue possible pour mesure les effets secondaires d'un vaccin, or ici ce n'est pas le cas", nous précise une autre infirmière. "Cela fait 10 mois que je travaille dans une unité covid, jusqu'ici je n'ai pas été atteinte par le coronavirus parce que je respecte les règles d'hygiène et que j'ai un équipement de protection. Je ne vois pas l'intérêt et je veux rester maître de la décision, je refuse qu'on me l'impose. Je n'accepte pas non plus que les firmes pharmaceutiques ne s'engagent pas en cas de conséquences par rapport à ce vaccin. Cela ne met pas vraiment en confiance. Qui va répondre si on a des effets secondaires dans le futur ?", poursuit-elle.

"Nous seront transparents"

Moncef Slaoui a justement expliqué, de manière imagée, comment ce vaccin a pu être produit aussi rapidement. "On a été très vite parce que la science nous a donné des technologies magnifiques", commence le spécialiste en immunologie. "C'est comme un lecteur de cassettes: vous pouvez écouter ce que vous voulez, le lecteur est le même, c'est la cassette qui change. Celles qui sont utilisées pour développer ces vaccins ont été découvertes ces 20 dernières années. Des investissements énormes ont été faits. On a mis la cassette du covid-19 dans le lecteur. C'est pour ça qu'on a gagné 5 ou 6 ans. On a pris des risques financiers, on a réalisé les études cliniques en parallèle tout en attendant chaque fois que les résultats nous disent qu'on peut passer à l'étape suivante. On a investi dans la manufacture, sans savoir si le vaccin allait marcher. C'est pour cela qu'on a été tellement vite", détaille-t-il ensuite.

Selon Moncef Slaoui, ces techniques, ces avancées et les tests réalisés permettent de prendre une avance considérable et de mesurer, aujourd'hui déjà, les effets secondaires potentiels. "On a 6 ou 7 mois d'expérience avec ces vaccins, pas 5 ans, ça c'est clair. Mais comment sait-on qu'il n'y a pas de danger ? On a regardé sur des études cliniques, réalisées sur des centaines de milliers de personnes ces 40 dernières années, sur tous les vaccins déjà approuvés. On a vu que 95% des effets secondaires ont lieu dans les 40 jours qui suivent la vaccination. On a mis comme règle qu'il fallait attendre au moins 60 jours avant de considérer l'approbation des vaccins. On peut raisonnablement prévoir que l'innocuité de ces vaccins à long terme va être similaire à celle de ceux qui ont été approuvés", détaille-t-il, affirmant que les effets les plus signalés sont des maux de tête et des frissons. 

Pour éviter tout doute et renforcer l'adhésin, Moncef Slaoui prône la transparence totale. "Il faut que toutes les données scientifiques soient accessibles à tous, qu'elles puissent en parler avec un médecin de confiance, par exemple", prône ce spécialiste.

"Il faut une immunité de masse"

Toujours selon lui, il faudra par contre se montrer patient. "Je pense que pour que la société reprenne sa vie normale, il nous faudra l'immunité de masse. Il faut entre 75 et 80% de la population soit vaccinée. Quand on prend des vaccins, on a une protection personnelle mais on a aussi un devoir civique. Mais il faut informer, il faut que la raison de la chose soit claire pour tout le monde. La transparence va être totale. Le processus se passe normalement, mais comme on a une pandémie, ça se passe avec 8,5 milliards de personnes qui nous regardent et braquent les projecteurs".

Une des autres craintes est l'absence de responsabilité. Les producteurs, soit les firmes pharmaceutiques, sont-elles responsables en cas d'effets secondaires ? "Dans le contrat, il y a deux aspects: l'aspect réglementaire européen qui est la responsabilité par rapport aux produits. Les firmes ne sont absolument pas exonérés de cet aspect-là, donc s'ils font des fautes, ils seront responsables. Mais s'il y a des effets indésirables qui n'ont pas pu être mesurés et qu'il y a une plainte, il faudra que quelqu'un intervienne et là il y a un accord pour que ce soit l'état membre de l'Union européenne", répond Xavier De Cuyper, l'administrateur général de l'Agence Fédérale des Médicaments et des produits de santé.

Il est très clair que de nombreuses questions vont encore se poser sur la nature de ce vaccin. Que des doutes subsisteront. Il faudra donc trouver un moyen de convaincre les sceptiques pour s'assurer que la campagne de vaccination soit un succès.

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