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Face à la juge, Salah Abdeslam refuse de répondre: "Je n'ai pas peur de vous" (vidéo)

 
 

Le premier procès de Salah Abdeslam s'est ouvert ce lundi matin à Bruxelles, concernant sa participation présumée à la fusillade de la rue Dries. Les soupçons concernant le refus de Salah Abdeslam de collaborer avec la justice semblent se confirmer: le suspect a expliqué qu'il ne répondrait pas aux questions de la présidente du tribunal.

La question était sur toutes les lèvres: Salah Abdeslam allait-il enfin sortir du silence dans lequel il s'était réfugié depuis deux ans? La réponse n'a pas tardé à arriver. Dès le début du procès, le seul survivant des commandos djihadistes qui ont attaqué Paris le 13 novembre 2015 a exprimé au tribunal son refus de répondre aux questions.
Deux policiers cagoulés observent le moindre geste de Salah Abdeslam

Salah Abdeslam, barbu et vêtu d'un polo blanc à manches longues, a aussi fait savoir par le biais de son avocat qu'il souhaitait qu'aucune image de lui ne soit prise par les médias, a indiqué la juge qui préside les débats.

L'ex-fugitif le plus recherché d'Europe, et Sofiane Ayari, lui aussi poursuivi pour la fusillade survenue à la rue du Dries, sont accusés de tentative d'assassinat sur des policiers et de détention d'armes prohibées dans un contexte terroriste.


Il a refusé de se lever

Selon notre journaliste Antoine Schuurwegen, présent au palais de justice de Bruxelles, Salah Abdeslam est arrivé dans la salle sous escorte policière et "aurait eu des difficultés à décliner son identité, du mal à affirmer que c'était bien lui lorsque la présidente du tribunal lui a posé la question".
 
De plus, un "léger incident " se serait produit en début d’audience. "Théoriquement, un détenu se lève pour décliner son identité et Salah Abdeslam aurait refusé, a révélé Claude Moniquet, expert en contre-terrorisme sur le plateau de notre émission spéciale ce matin. Cela montre bien le refus de collaboration. C’est très symbolique".

Salah Abdeslam refuse de se lever


Après avoir interrogé Sofiane Ayari, l'autre inculpé dans ce procès (son audition se trouve ci-dessous dans l'article), la présidente Marie-France Keutgen s'est tournée vers Salah Abdeslam et l'a invité à se lever. À nouveau, l'individu est resté assis. "Je suis fatigué", semble-t-il avoir murmuré.


"Je témoigne qu'il n'y a pas de divinité autre qu'Allah et Mohamed est son prophète"


La présidente Marie-France Keutgen

Salah Abdeslam a à nouveau fait part de son refus de répondre. "Pourquoi souhaitez-vous être là alors que vous ne souhaitez pas répondre?", lui a demandé la présidente. "Moi, on m'a dit de venir, je suis venu. Il y a un procès, je suis l'acteur de ce procès. Maintenant il y a des preuves dans cette affaire, des preuves tangibles, scientifiques, j'aimerais que ce soit sur ça qu'on se base et qu'on ne se base pas, qu'on n'agisse pas pour satisfaire l'opinion publique, pas faire de l'ostentation comme les médias. Ce que je constate c'est que les musulmans sont jugés et traités de la pire des manières. Il n'y a pas de présomption d'innocence", a affirmé l'accusé.

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"On n'est pas là avec des préjugés", a rétorqué Marie-France Keutgen. "Je garde le silence. Mon silence ne fait pas de moi un coupable ou un criminel, maintenant jugez-moi, faites ce que vous voulez de moi, moi c'est en mon Seigneur que je place ma confiance, je n'ai pas peur de vous, de vos alliés et de vos associés. Je place ma confiance en Allah, je n'ai rien à ajouter", a réagi Salah Abdeslam.

Malgré le respect dont a fait preuve la présidente envers l'accusé Salah Abdeslam, celui-ci n'a fait qu'exprimer son refus de répondre, le tout avec un comportement arrogant.

Sven Mary, l'avocat de Salah Abdeslam
 

Sofiane Ayari prétend qu'il "n'est pas radicalisé"

Notre journaliste Antoine Schuurwegen a aussi pu observer l'autre suspect: Sofiane Ayari. "Il y a eu une brève interruption suite à la constitution de partie civile des victimes des attentats du 22 mars et du 13 novembre. Puis, l'audition de Sofiane Ayari, qui est jugé aux côtés de Salah Abdeslam pour la fusillade, a commencé. Il a été interrogé sur son passé. Il prétend qu'il n'est pas radicalisé. Lorsque la juge lui a demandé pourquoi on avait retrouvé différents papiers avec plusieurs identités, il a refusé de s'expliquer", décrit notre reporter.

La présidente a ensuite interrogé Ayari sur son voyage en Syrie en 2014: l'homme était parti à l'insu de ses proches. Les réponses du prévenu n'ont pas pu être entendues dans la salle de presse. Sofiane Ayari est arrivé en Allemagne avec un flot de migrants, rencontrant en route Osama Krayem, soupçonné d'avoir acheté les sacs utilisés pour les attentats de Bruxelles. Son objectif n'était "pas forcément" de se rendre en Belgique, selon lui. La présidente lui a fait remarquer que des faux papiers au nom des deux hommes avaient pourtant été confectionnés en Belgique une semaine avant que Salah Abdeslam vienne les chercher en Allemagne, le 3 octobre. Interrogé sur les lieux où il a été hébergé et les personnes qu'il a rencontrées après avoir été convoyé par Salah Abdeslam le 3 octobre 2015 lorsqu'il est arrivé en Allemagne, Sofiane Ayari a encore refusé de s'expliquer.

Cependant, l'accusé a admis devant le tribunal qu'il se trouvait bien dans l'appartement de la rue du Dries à Forest, le 15 mars 2016, avec Mohamed Belkaïd et Salah Abdeslam. Il y a passé "plusieurs semaines" mais dit ne pas savoir qui louait l'appartement. Sofiane Ayari s'occupait surtout des courses, avec de l'argent fourni par Belkaïd, selon lui. L'auteur de l'attentat à l'aéroport de Bruxelles le 22 mars, Ibrahim El Bakraoui, est venu plusieurs fois rue du Dries, principalement pour voir Belkaïd, a aussi affirmé le prévenu. Pendant les semaines suivantes, il n'a "rien fait de spécial".


Sofiane Ayari interrogé sur les armes et le drapeau de l'EI présents dans l'appartement

Sofiane Ayari a été questionné sur la présence d'armes dans la planque de la rue du Dries. "Je ne sais pas", a répondu l'accusé. "Ces armes étaient déjà là à votre arrivée?", a relancé la présidente. "Je ne me rappelle pas", a-t-il dit. "Ces armes étaient destinées à quoi?". "Je ne sais pas", a encore répondu Sofiane Ayari. "Vous ne vous êtes pas interrogé? Tout le monde n'a pas des armes dans son appartement", a fait remarquer la présidente. "Je ne souhaite pas répondre", a dit l'accusé.

Un autre échange a eu lieu à propos de la présence d'un drapeau de l'Etat islamique dans l'appartement de la rue du Dries.
- La présidente: "Est-ce vous qui avez accroché un drapeau de l'Etat islamique au mur ?"
- Sofiane Ayari: "Je ne m'en rappelle pas."
- La présidente: "Êtes-vous favorable à l'Etat islamique ?"
- Sofiane Ayari: "Je ne sais pas comment chacun apprécie l'Etat islamique"
- La présidente: "Mais accepter un drapeau dans le lieu où je loge... ?"
- Sofiane Ayari: "Ça dépend de plusieurs facteurs, c'est politique, j'adhère à quelques points mais pas à tous."
- La présidente: "Pouvez-vous expliquer au tribunal avec quoi vous êtes d'accord ?"
- Sofiane Ayari: "Lorsqu'ils combattent Assad." (NDLR: le président syrien)
- La présidente: "Et quand ça ne concerne pas Bachar el-Assad ?"
- Sofiane Ayari: "Je ne veux pas aborder le sujet".

Plus tard au cours de l'audition, la présidente est revenue sur la question du groupe terroriste.
- La présidente: "Que pensez-vous des attentats commis par l'Etat islamique dans les pays européens ?"
- Sofiane Ayari: "D'abord, je n'ai pas participé à ces attentats. Je voulais juste rentrer en Syrie."
- La présidente: "Qu'alliez-vous faire en Syrie ? C'est un pays en guerre."
- Sofiane Ayari: "Je ne veux pas revenir là-dessus. Je me suis déjà expliqué."
- La présidente: "Votre but était bien de rejoindre l'Etat islamique ?"
- Sofiane Ayari: "Je n'avais pas d'autre choix. Je ne pouvais pas revenir en Tunisie car je risquais la prison. Donc oui, j'allais rejoindre l'Etat islamique."
- La présidente: "Pensez-vous que certains attentats commis en Europe étaient justifiés ?"
- Sofiane Ayari a refusé de répondre.


"Qui a tiré sur les policiers?"

La suite de l'audition s'est attardée sur la fusillade. La présidente Marie-France Keutgen a demandé à Sofiane Ayari qui avait tiré sur les policiers. L'accusé a rétorqué que c'était Mohamed Belkaïd, l'homme tué par la police durant la fusillade, et a affirmé que Salah Abdeslam n'avait pas tiré. "L'arme retrouvée à côté du corps de Belkaïd avait tiré à 12 reprises. Il a été établi que la kalashnikov emportée par les fuyards avait tiré à 8 reprises. Comment expliquez-vous cela ?", a demandé la présidente. Selon le prévenu, Mohamed Belkaïd aurait utilisé les deux armes. Sofiane Ayari prétend qu'au moment de l'intervention policière, il se trouvait dans la pièce du fond de l'appartement. Après un premier échange, il a trouvé ce dernier allongé, apparemment inconscient, et a pensé qu'il était mort.

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Sur la rapidité de la réplique à l'arrivée de la police, la présidente a demandé à Sofiane Ayari si les armes étaient prêtes à être utilisées. "Je ne le pense pas", a affirmé ce dernier. "Mais lorsque les policiers interviennent, tout va très vite. Belkaïd n'a pas pris le temps de charger l'arme", rappelle Marie-France Keutgen. "Ça ne prend pas beaucoup de temps de charger l'arme...", a souligné Ayari.

Alors qu'il parle bien le français, Sofiane Ayari, Tunisien, fait de plus en plus appel à l'interprète qui l'accompagne pour répondre aux questions. Lorsque l'audition se fait plus détaillée, il indique qu'il s'en tient aux déclarations faites lors de ses interrogatoires et qu'il ne veut pas en dire davantage.


 

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